Innovation, recherche et enseignement supérieur : un projet de Loi inacceptable
Par
, , le 24 janvier 2005Le texte qui suit s’inscrit dans la première analyse faite par SLR sur le projet de "Loi d’orientation et de programmation sur la recherche et l’innovation" (http://www.sncs.cnrs-bellevue.fr/article.php3?id_article=66). Il vise surtout, à partir des chiffres, à montrer que ce qui est dit par SLR ne relève pas du simplisme. Il vise aussi à faire des contre-propositions sur les grandes masses budgétaires. C’est un texte de travail. Il y a sans doute des erreurs, des lacunes, des oublis. Ne tirez pas sur les pianistes, envoyez nous simplement vos contributions et chiffrages, notamment là où ils ne sont pas achevés. Merci.
Pour comprendre les chiffres du projet de LOP comme ceux de ce texte
Dans le tableau récapitulatif à la fin du projet de LOP sont représentés
en jaune ce qui est budgétaire, en vert ce qui est extra-budgétaire
(ressources venant des privatisations), en bleu les incitations fiscales,
en brun les totaux. Dans ce qui est budgétaire, le "Titre III" concerne
les salaires, le "Titre IV" la formation (allocations) et le "Titre VI"
les crédits.
On peut utiliser les chiffres de prévisions pluriannuelles de trois
façons. Soit en regardant de combien progressera telle ligne entre 2005 et
2010 en rouge ou italique dans ce texte et l’annexe, soit la croissance
par an en bleu ou gras, soit de manière cumulative en vert ou
souligné. Contrairement à la première version, nous n’avons que peu
utilisé cette dernière façon de décompter, peu parlante. Nous utiliserons
Md€ = milliard €, m€ = million €. Exemples d’ordres de grandeur : budget
CNRS 2,2 Md€ dont 464 de CP, CP des EPST 0,8 Md€.
1- La Loi contient des aspects positifs qui n’auraient jamais existés sans
les EGR
Avant d’analyser en détail le projet de Loi du 7 janvier 2005, nous
affirmons qu’il n’y aurait jamais eu une programmation en croissance de
l’effort de recherche sans le mouvement que l’on sait. Les ministres
réaffirment même, dans le sillage des EGR, leur engagement de consacrer,
en 2010, 3% du PIB à la recherche-développement.
C’est ce même mouvement qui a mis fin aux deux ans de chute abyssale des
crédits publics de organismes et des universités et à la cascade des
suppressions d’emplois. Les ministres se sont enfin engagés à faire
reconnaître le doctorat dans les conventions collectives et le problème de
la couverture sociale (doctorants et post-docs) est posé. Nous avons aussi
gagné des allègements administratifs pour lesquels les EGR se sont
fortement battus.
Mais à l’aune de la grande ambition des EGR, ces gains sont TRÈS loin de
l’objectif. Les moyens sont programmés pour atteindre seulement 2,49 % du
PIB (d’après le dernier chiffre du tableau récapitulatif), les organismes
ne bénéficieront pratiquement pas des 14,2 milliards € (G€) de plus d’ici
2010, soit un de plus par an (19,2 G€ avec l’Agence de l’Innovation
proposée par Beffa), le plan pluriannuel de l’emploi scientifique relève
par trop de l’homéopathie par rapport à nos demandes, on va vers un
fantastique accroissement du financement contractuel et des demandes de
contrats à effectuer.
2- Une programmation très insuffisante, visant seulement 2,49 % du PIB
en 2010
Dans une introduction qui n’a aucun rapport avec le contenu concret des
propositions structurelles ou quantitatives qui la suivent, il est fait
mention de la nécessité d’atteindre 3 % du PIB. Le tableau récapitulatif
annonce 2,49 % en 2010.
L’annexe 2, où les chiffres sont détaillés, montre qu’il conviendrait
d’accroître, de 4,5 Md€ par an l’effort de recherche (public + privé),
alors que 2,58 Md€ seulement sont prévus dans le projet. Alors que les
EGR demandait un milliard de plus par an pour la recherche publique à PIB
constant (près de 1,2 Md€ avec la croissance du PIB), seuls 0,4
Md€ sont prévus, hors innovation. Cela a deux conséquences majeures :
l’emploi scientifique est sacrifié, et il n’y aura pas un sou de plus pour
les crédits de base des organismes et universités. Rien n’est prévu non
plus sur le plan complémentaire que nous demandions pour les universités
(taux d’encadrement des étudiants, bâtiments, cités universitaires,
bourses, etc.).
Sur les 2,58 Md€ par an prévus pour le financement public et privé,
les 1,11 Md€ d’origine publique sont répartis comme suit (ANR = Agence
nationale de la recherche ; AII = Agence de l’innovation industrielle du
rapport Beffa) :
Financements Budgétaires 448 m€/an
Financements Extra-budgétaires 424 m€/an dont ANR : 224/an
et AII : 200/an
Dégrèvements fiscaux (entreprises) 237 m€/an
Hors AII, qui relève de la politique industrielle d’après Beffa lui-même, et hors dégrèvement fiscaux (dont l’ossature demeure le crédit d’impôt ancienne formule), la progression sur 5 ans est que de 0,672 Md€/an pour la recherche publique et privée. En calcul cumulé sur 5 ans cela représente de l’ordre de 10 Md€ pour la recherche publique ET privée, alors que la demande des EGR était de 15 milliards pour la seule recherche publique (1+2+3+4+5 Md€). Ce sont plus de 5 milliards d’€ qui manquent à la recherche publique. Ce retard, additionné à la planification d’un effort insuffisant du privé pour financer sa propre recherche (la proposition des EGR pour accroître ce taux n’a pas été retenue), expliquent que l’on va passer de 2 % du PIB aujourd’hui à 2,49 % en 2010, et non à 3 %.
3- Le projet trahit complètement les équilibres des propositions des
EGR.
L’élaboration et la transmission des connaissances oubliées
Non seulement il manque 0,4 Md€/an (5 à 6 milliards cumulés sur 5 ans) pour la recherche publique, mais par son orientation générale, les objectifs sur lesquels il insiste, la longueur relative des développements et surtout par la programmation proposée, le projet de LOP apparaît comme un projet pour l’innovation et les technologies, ainsi que des recherches publiques qui y concourent. Il ne constitue en rien un projet considérant la recherche dans toutes ses dimensions, et donc prenant AUSSI fortement en compte l’élaboration et la transmission des connaissances. Rappelons que les EGR indiquaient : "L’élaboration des connaissances scientifiques, est la première mission. La recherche scientifique possède sa logique propre, qui implique un principe d’autonomie garant de la cohérence et de la rationalité de cette activité".
Une répartition financière outrancièrement déséquilibrée
Tout l’accent est mis sur la recherche orientée et/ou en amont de l’innovation (détaillé annexe II). Si on considère la progression 1,11/an (5,54 Md€ en 5 ans) de financements publics, ils se décomposent comme suit : Innovation et dégrèvements (public + privé) 64,4 %, Personnels 20 %, Crédits orientés 15,6 %, Crédits de base (organismes, universités) 0,0 % .
RIEN n’est en effet prévu pour accroître les crédits de base des
laboratoires via les EPST, les universités et la plupart des EPIC. Tout au
plus peut-on dire que les établissements bénéficieront indirectement de
80 m€/an pour les PRES (encore que le terme PRES étant lié dans le
texte à celui de pôles de compétitivité, on peut se demander si l’argent
n’est pas pour ces derniers ), et pour les équipements communs (une partie
va à la "fusion" donc à ITER, mais rien n’est prévu sur le SHS)
Hors personnels, la quasi totalité des crédits sont soit orientés (ANR)
et/ou sur des thèmes liés à l’innovation : dégrèvements d’impôts, AII,
RNIT, instituts de recherche partenariales public-privé, transfert
technologique, soutien au capital risque, parcs mutualisés , ANVAR,
contrats d’objectif du CEA (Minatec, etc.) et du CNES, très liés à
l’industrie. Dans le moindre détail, tout est fait pour renforcer cette
orientation : avantages données aux Ecoles doctorales liées à l’industrie,
augmentation du crédit d’impôt quand une entreprise passe un contrat avec
un labo. Le plus insidieux : créer 100 postes d’accueils dans les EPST et
100 dans les EPIC alors que le potentiel de recherche de base y est 5 fois
moindre, mais ces derniers sont plus liés à l’industrie.
Soyons très clairs. Le rapport Beffa (sous réserve d’inventaire et de ses modalités) est conforme aux demandes des EGR pour une politique industrielle soutenue par la recherche privée et les aides "ciblées" de l’Etat. Certaines des propositions pour une bonne interaction public-privé figurent dans les EGR et seraient intéressantes dans un contexte où les moyens des établissements et l’emploi public auraient crus d’une manière significative. La critique porte sur le fait que, prises dans leur globalité, les propositions faites dans le projet sont contraires aux équilibres proposés par les EGR : il manque tout ce qui concerne l’élaboration et la transmission des connaissances.
La transformation du HCS en HCRI et les contours du ministère
Cette orientation est parfaitement illustrée par la tentative de
transformer le Haut Conseil à la Science des EGR en Haut Conseil à la
Recherche et l’Innovation (HCRI) dans le projet de Loi, coiffant notamment
la nouvelle Agence pour l’Innovation du rapport Beffa. Le HCS doit rester
le HCS avec les missions proposées par les EGR, à savoir un rôle central
dans la politique nationale de recherche, y compris dans les rapports de
celle-ci avec l’enseignement ou le privé. L’Agence pour l’Innovation part
d’une problématique industrielle de marché (ce qui est normal), mais non
d’une problématique recherche. Il y aurait donc changement de nature du
travail et de la composition du HCS si son rôle était ainsi élargi. Par
contre, au coup par coup, il peut très bien être sollicité sur les aspects
recherche de tel programme industriel financé par l’Etat. Notre
proposition est conforme à celle du rapport Beffa, et il sera difficile
pour le gouvernement de s’accrocher à la sienne.
Ce n’est pas un hasard non plus si la possibilité de créer un ministère de
la recherche et de l’enseignement supérieur n’est jamais évoquée. Bien
sûr, les contours des ministères ne relèvent pas de la Loi, mais ce qui
est décrit dans le texte c’est un ministère de l’Innovation.
3- Une volonté de dirigisme et de pilotage sans rivages
Le dirigisme au niveau institutionnel
Il se reflète notamment dans :
un Haut conseil à la recherche et l’innovation dont les membres sont
entièrement nommé ;
une Agence pour la recherche, pièce maîtresse de la distribution des
moyens, qui deviendra un EPIC et que le gouvernement contrôlera totalement
au travers de son CA ;
des PRES, dont le Président sera nommé par le gouvernement ;
des instances d’évaluations où les nommés seront majoritaires.
Un HCRI nommé, conseillant une Agence dans les mains du gouvernement,
distribuant des contrats, sur avis d’instances majoritairement nommées, à
un Président de PRES nommé.
Un fantastique accroissement de la part du financement contractuel
Dans le rapport des EG, nous demandions la création d’une agence de financement, le CoFiPS, jouant un rôle de guichet unique pour les financements non-récurrents. Il s’agissait d’une structure légère, complémentaire des opérateurs de recherche (organismes, universités) et dont les fonds soient tels que les crédits de base des laboratoires représentent en moyenne 70 % de l’ensemble des crédits hors-salaires. Dans le projet de loi, l’ANR devient un EPIC, doté de 1,47 milliards d’euros à échéance 2010 (200 m€/an pour FNS + FRT ces dernières années). Avec un tel montant, le financement de personnel temporaire deviendra nécessairement très important. Il s’agit donc d’un contournement des opérateurs de recherche. Alors que nous demandions des moyens supplémentaires pour ces derniers, toute l’augmentation va à l’ANR et l’AII. De plus, les personnels employés par l’agence dans le cadre des contrats seront en CDD, ce qui conduit à s’interroger sur le nombre de contrats temporaires ainsi créés et sur la durée de ces contrats.
En 2010, l’ANR sera donc dotée de 1,47 milliards soit deux fois les CP de tous les EPST, et quatre fois les crédits de base qu’ils distribuent (hors constructions, centres de calcul, gros équipements, etc.). C’est une folie que de multiplier par un facteur 6 les crédits (FNS + FRT) en l’espace de 5 ans. Certes cela a pour logique de vouloir tuer le rôle des établissements et de piloter toute la recherche, mais conduira de plus à des gaspillages monstrueux et des cloisonnements supplémentaires. Cela n’a rien à voir avec le CoFiPS proposé par les EGR.
Cette ANR va devenir un EPIC par lequel passeront toutes les priorités gouvernementales, tout en créant une strate et un cloisonnement supplémentaires. Aujourd’hui, en moyenne, au CNRS, les laboratoires disposent déjà plus en ressources propres (qui ne financent que pour une faible part des personnels) qu’en ressources venant de la subvention d’Etat de l’organisme. Si on prend en compte le financement contractuel interne, les crédits de base ne représentent que 35 % et les ressources contractuelles 65 %. Avec l’envol des crédits de l’ANR et l’accroissement des autres sources (Europe, régions et retombées des interfaces public-privé), on peut évaluer que le financement de base va tomber à moins de 20 % en moyenne, alors que les EGR demandaient 70 %.
Il est probable qu’en moyenne, les laboratoires recevront plus d’argent, mais avec de très grandes disparités. Fussent-ils "excellents", les laboratoires qui ne seront pas dans les bons créneaux, ou n’ayant pas d’intérêt industriel direct, seraient condamnés si ce projet passait. Cela concerne des disciplines entières (de tout le SHS à la physique théorique ou aux mathématiques), et sans doute la majorité de celles-ci, dès lors que leur objet est l’élaboration des connaissances. Pour les autres, le prix à payer pour une certaine aisance sera la perte de liberté et beaucoup plus de contrats à faire.
5- Les établissements considérablement affaiblis
Les organismes
Affaiblis financièrement, les organismes voient leur rôle dans la politique nationale de recherche entièrement repris par l’ANR et donc le gouvernement. Leurs laboratoires seront pilotés par d’autres. Ils sont réduits au rôle d’employeur de chercheurs et d’ITA pour exécuter le programme de l’ANR.
Les universités
De même les universités sont contournées dans le projet actuel. Nous
demandions à ce qu’elles soient réformées afin de jouer un rôle important
en matière de recherche, et qu’elles soient toutes rattachées à un pôle de
recherche et d’enseignement supérieur (PRES), multidisciplinaire. On nous
propose de les laisser en l’état, et d’attribuer les moyens
supplémentaires aux PRES. Ces derniers seraient souvent thématiques, et
toutes les universités ne seraient pas rattachées à un PRES. Les
déclarations ministérielles font craindre qu’il n’y ait que quelques PRES
"d’excellence". Plutôt que d’essayer de tirer le meilleur profit des
structures existantes, il s’agit donc de concentrer les moyens sur une
partie d’entre elles.
Mais surtout, plutôt que de réformer la gouvernance des universités,
d’alléger leurs contraintes administratives (marchés) le projet préfère
définir des modalités de direction des PRES qui sont inacceptables :
nomination du président du PRES par le ministre, absence de conseil
scientifique, proportion des représentants élus non précisée.
D’autres éléments sont très préoccupants, comme la possibilité d’employer
des personnels sous contrat privé. Utilisée marginalement, cette
possibilité n’est pas nécessairement mauvaise, mais l’absence de cadre
peut conduire à des dérives : qu’est-ce qui empêcherait d’employer des
enseignants-chercheurs sur de tels statuts ? N’est-on pas en train de
mettre en place un système à deux vitesses, avec des universités laissées
dans leur état dégradé, et des PRES seuls bénéficiaires des efforts
financiers ?
6- L’emploi scientifique et l’attractivité des carrières traités par
l’homéopathie
Un plan pluriannuel squelettique, la précarité devient la norme
L’emploi est l’aspect le plus catastrophique du projet. Il existe un
facteur de l’ordre de 4 entre les demandes des EGR et le plan proposé.
Cette faible croissance ne compensera même pas la baisse des départs en
retraite, les gens partant plus tard du fait de l’allongement du nombre
d’années nécessaires. Le recrutement des jeunes baissera sensiblement.
Rien n’est prévu non plus pour intégrer sur des emplois stables, les
personnels précaires ayant des fonctions permanentes (nombreux chez les
IATOS). Il est seulement prévu :
500 postes d’E-C et 100 d’IATOS créés par an pour 25 m€/an
30 chercheurs INRIA, 200 accueils d’EC et 100 ITA par an pour 16
m€/an
200 accueils/an "haut niveau" (26,5 m€) et 7500 moniteurs (6,5
m€) pour 33 m€/an.
Le contraste entre la croissance des crédits et celle des personnels statutaires s’explique bien sûr par la croissance inéluctable des CDD ou des contrats de type privé. En effet, les contrats de l’Agence seront calculés en "coût complet", incluant explicitement les personnels à recruter. A cette fin les GIP et les PRES pourront gérer des personnels non statutaires.
Des carrières basées d’abord sur des primes
Si 104 millions sont consacrés par an à l’attractivité des carrières. La part importante est basée sur des primes (38 m€/an). L’accélération de la carrière des chercheurs représente 41 m€ et l’amélioration des débuts de carrières pour tous ne monte qu’à 24 m€/an. Il n’y a rien pour les IATOS et les ITA, en tout et pour tout, "bénéficient" de 3 millions sous forme de primes.
La recherche des enseignants-chercheurs
En l’Etat du projet, seul le quart des jeunes MC bénéficiera d’une décharge à mi-temps. La croissance des postes d’accueil est très faible. A l’évidence, ce problème a été aussi totalement minimisé. Au delà des belles phrase, le gouvernement manifeste un désintérêt profond pour les universités et l’enseignement.
Les jeunes
S’il faut souligner comme positive la volonté de reconnaître la thèse dans les conventions collectives (mais pas dans la fonction publique où le gouvernement a la main) ou l’indexation sur les prix du montant de l’allocation, les progrès sont très modestes au regard des propositions détaillées des EGR : (i) création de 2000 (en deux ans) allocations de plus et leur revalorisation (que nous n’avons su calculer pour l’instant) soit 25 m€/an, (ii) la progression des CIFRE (5) et (iii) la création de 60 chercheurs associés par an (14 m€).
En résumé, les orientations choisies, la mise du HCRI nommé au centre
du dispositif, et de l’ANR avec un statut d’établissement industriel et
commercial et des moyens gigantesques, conduisent à une révolution
complète du système de recherche français, en marginalisant le rôle des
établissements et en condamnant la majorité des disciplines.
Ce projet s’accompagne d’une multiplication des structures pour exercer un
dirigisme au niveau politique global et un pilotage par les entreprises au
niveau local.
Ces choix vont de pair avec celui de la précarité des jeunes, en accord
avec des recherches le plus souvent finalisées et à court terme.
Les recherches liées à l’élaboration des connaissances et la transmission
de celles-ci seront les grandes victimes de ce projet. Les laboratoires
qui voudront survivre devront aller là où il y a de l’argent frais : à
l’ANR, aux interfaces public-privé voire à l’Agence pour l’Innovation.
ANNEXE I : DES CHIFFRES QUI MENTENT MOINS QUE LES MOTS
La recherche atteindrait 2,49 % du PIB en 2010 et non 3 %
La dernière ligne du tableau récapitulatif donne l’objectif du projet
gouvernemental : 2,49 % du PIB en 2010. A partir des derniers chiffres de
ce tableau (DIRD 2005 = 32,855 Md€, progression 2005-2010 programmée
12,919 Md€ soit 2,58 Md€/an, accroissement du PIB prévu 12 % soit
2,25 % par an), on peut déduire que le gouvernement évalue à 2 % du PIB
l’effort de recherche en 2005. Ce chiffre est cohérent avec celui de 2002
puisque les crédits publics ont baissé et le PIB a augmenté.
La programmation est donc de faire passer de 2 à 2,49 % du PIB et non 3 %.
Combien faut-il pour atteindre 3 % du PIB ?
L’objectif devrait être de passer de 32,855 Md€de 2005 (2 %) à 49,28 Md€
(3 %) à atteindre, à PIB constant en 2010. Mais comme en 5 ans on peut
prévoir (voir prévision volontairement pessimiste du projet : PIB = + 2,25
%/an) une croissance de 13 % de PIB, l’objectif réel est 55,19 Md€. Il
faut donc 22,34 Md€ de plus en 5 ans soit, pour simplifier, 4,47 Md€
de plus par an. Soit 1,89 Md€ de plus que ce que propose le
gouvernement.
Comment est réparti cet effort dans le projet
La part de la recherche dans le PIB est la somme des investissements
publics et privés, qui se répartissent comme suit. Par rapport à la
répartition du budget 2004 (Loi de Finance), on constate qu’une fraction
importante des crédits publics est détournée vers les aides au secteur
privé.
Croissance 2005-2010 % dans le
Montant (Md€) % Budget 2004
Financement public pour le secteur public 3,04 23,5 % (36,6
%)
Financement public pour le secteur privé 2,5 19,4 % ( 7,6
%)
Financement privé pour le secteur public 0,5 3,8 % ( 2
%)
Financement privé pour le secteur privé 6,87 53,2 %
(53 %)
Origine des financements publics
L’origine des 5,54 Md€ (non cumulés) de croissance entre 2005 et 2010 a trois origines :
1- Financements Budgétaires 2,238 Md€
(0,448/an)
2- Financements Extra-budgétaires 2,120 Md€ (0,424/an)
dont ANR 1,120 (224/an)
dont AII 1,000 (200/an)
3- Dégrèvements fiscaux (entreprises) 1,187 Md€ (0,237/an)
On retrouve les 2,5 Md€ qui vont directement aux entreprises en additionnant l’AII, les dégrèvements d’impôts et 30 % de l’ANR, pour des raisons explicitées plus loin.
La répartition des financements publics
Financements budgétaires (2,238 Md€)
Personnels (emploi, carrières, jeunes) 1,120 Md€ (0,22/an)
Crédits (PRES +TGI) 0,400 Md€
(0,08/an)
Interface public-privé 0,718 Md€ (0,14/an)
ANR (1120 Md€) et AII
Pour sa quasi-totalité l’AII est prévue pour aller vers le privé. Pour
l’ANR, 60 % iront aux RNIT (dont la moitié directement au privé) et 40 %
aux programmes.
Réseaux Nationaux d’Innovation Technologique 0,663 Md€ (0,13/an)
Programmes, projets blancs 0,457 Md€ (0,09/an)
Au total, en 5 ans les financement supplémentaires liés à l’innovation (dans les labos publics ou privés) et au transfert augmentent de 2,38 Md€ (0,718 + 1 +0,663) aux quels s’ajoutent les 1,187 Md€ de dégrèvements soit un total de 3,57 Md€
Les 5,54 Md€ de financements publics se décomposent comme suit :
Innovation (public + privé) 64,4 %
Personnels 20 %
Crédits orientés 15,6 %
Crédits de base (org., univ.) 0,0 %
Annexe II : des contre-propositions sont nécessaires
Les contre-propositions sur les structures sont faciles et figurent dans les EGR. Nous n’en traiterons donc pas ici. Une première tentative est faite ci-dessous sur le plan financier en prenant en compte l’esprit et la lettre du rapport avec les EGR. Ce n’est qu’une ébauche. A corriger et à discuter.
5 milliards (cumulés sur 5 ans) de plus de dépenses indispensables
Crédits de base
Il faut doubler les crédits de base des universités, EPST et de la frange
recherches de base des EPIC. Les CP correspondants représentent environ
1,5 milliards en 2005, utilisés pour moitié en crédits de base. Doubler
cette fraction en 5 ans (+ 15 % par an) représente une dépense cumulée de
2Md€
Emplois
Les chiffres ont été calculés par différence entre le nombre proposé par les EGR et celui du projet, en se référant pour chaque ligne au coût unitaire d’un emploi de chaque type de poste utilisé dans le projet. Le nombre mentionné est, par ligne, celui manquant sur 5 ans. Le coût est cumulé sur 5 ans.
8500 MC de plus (1700/an) 1 Md€
2000 ITA (+400/an) 0,2
4500 IATOS (+ 900/an) 0,36
1350 chercheurs EPST de plus 0,1
17500 Moniteurs de plus 0,28
1500 accueils EC (300/an dans EPST) 0,22
Au total, il faut 1,16 Md€ sur l’emploi.
Attractivité des carrières (jeunes, grilles, passages)
Non encore évalué dans le détail, mais de l’ordre de 2 Md €, si on veut s’intéresser aux jeunes, aux enseignants-chercheurs, aux chercheurs et aux ITA et IATOS sur la base de nos propositions.
Il faut donc trouver au total 5 milliards d’euros
Où trouver les 5 milliards d’euros ?
Sur la croissance des aides fiscales et sur le stock actuel du crédit
d’impôt (partie non ciblée) une économie de 2 Md€ peut être faite. Ce
d’autant que la croissance des aides aux entreprises, directes (AII) ou
indirectes (dégrèvements ciblés) resteront en très forte croissance.
En reprenant la proposition des EGR, de taxer, avec "un crédit d’impôt
flottant", les grandes entreprises qui bénéficient de la recherche, mais
n’en font pas (banques, assurances, grande distribution...), 1 Md€ doit
être obtenu.
On pourrait, sans difficulté, changer l’affectation de 1,5 Md€ des
3,5 Md de l’ANR. Par exemple, l’ANR pourrait financer des mesures
structurantes qui sont sur des lignes budgétaires dans le projet : sur les
PRES et les équipements, ainsi que les chercheurs étrangers. Cela
dégagerait 1,5 Md€ de crédits budgétaires pour participer au financement
des crédits de base et de l’emploi. Ce serait d’autant plus justifié,
qu’une partie de l’argent de l’ANR va servir à payer des CDD en lieu et
place d’emplois budgétaires, argent qui ne sera plus nécessaire si des
emplois budgétaires sont créés.
Cela laissera l’ANR à un niveau plus que confortable, mais il faudra
s’assurer de modalités qui permettent à l’ANR de jouer aussi un rôle dans
le développement des connaissances, et sur l’ensemble des disciplines (SHS
notamment), à partir des propositions des EGR (programmes fédérant les
organismes, mesures structurantes, projets spontanés).
Enfin 0,4 Md€ pourraient être transférés des primes à l’amélioration
des carrières sur la base du "mérite" (passage de grade après évaluation).