Lettre ouverte à Nicolas Sarkozy
Par
, le 9 octobre 2006M. Sarkozy,
Dans un récent discours, vous vous êtes adressé à quelques personnels de la recherche et de l’enseignement supérieur, que vous aviez invités à la convention organisée par votre parti, en affirmant :
"Nous avons fait notre révolution culturelle (...) et nous avons compris que nous avons péché par absence de réflexion, d’investissement personnel, de contact, de dialogue avec des femmes et des hommes comme vous"
Aucune réforme de fond des universités et des EPSTs, ne réussira sans passer par un dialogue réel avec les intéressés.
Quel dommage alors d’avoir décliné notre invitation à l’Université d’Automne de SLR, qui réunissait le week-end dernier des « hommes et des femmes comme [nous] », alors que nous vous avions contacté, et étions prêts à dialoguer avec vous, comme nous l’avons fait avec plusieurs candidats potentiels à l’élection présidentielle. Vous êtes en quelque sorte un récidiviste. En 2004, vous aviez déjà refusé le dialogue avec les chercheurs aux Etats Généraux de Grenoble. En 2006, lors de la discussion de la loi sur la recherche, vous avez fait ou laissé bloquer par l’UMP nombre d’amendements qui avaient reçu l’aval de la communauté scientifique et de plusieurs instances aussi respectables que le Conseil Economique et Social ou le CSRT. Est-ce cela, votre sens du dialogue ?
M. Sarkozy, vous proposez également dans ce même discours « d’augmenter de 50% les moyens des universités et de 15 milliards d’euros ceux de la recherche et développement au cours de la prochaine législature. » Comment pourrions nous vous croire, alors que nous savons que les députés de votre parti vont voter le projet de budget 2007, qui lui prévoit une stagnation des moyens des universités et des organismes de recherche. Faut-il vous rappeler que la loi de programmation de la recherche, que seule l’UMP a votée, prévoit une stagnation du budget de Mission Interministérielle de la Recherche et de l’Enseignement Supérieur jusqu’en 2010 ?
Monsieur Sarkozy, la communauté scientifique garde en mémoire les propos de M. Chirac, candidat à l’élection présidentielle en 2002. Il déclarait à l’époque : « Avec moins de 2,2% du PIB, la recherche française ne peut plus faire face à la compétition internationale. Le temps d’un simple rattrapage est révolu ! L’engagement doit être à la mesure d’un tel défi : le montant des dépenses publiques et privées consacrées à la recherche et au développement doit être porté à 3 % du PIB avant la fin de cette décennie. La France pourrait ainsi, dès 2007, se trouver en tête des pays de l’Union Européenne dans ce domaine (...). » A peine arrivé au pouvoir, le même Jacques Chirac s’empressait de mettre en oeuvre de coupes budgétaires sans précédent qui devaient déclencher le mouvement de colère de 2004, alors même que vous étiez son ministre des Finances. Il est juste de juger les hommes sur leurs actes, pas sur leurs promesses.
Monsieur Sarkozy, pour refonder une relation de confiance avec la communauté scientifique, il faudra des actes, un dialogue réel, pas seulement des promesses ; un dialogue qui ne se limite pas aux chercheurs que vous aurez choisis, dans un cadre fixé par vos soins.