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Principales propositions du Rapport Attali concernant l’enseignement supérieur et la recherche

le 24 janvier 2008

Le texte complet du rapport est téléchargeable : http://www.liberationdelacroissance...

UN ENSEMBLE UNIVERSITÉ/RECHERCHE À LÉGAL DES MEILLEURS MONDIAUX

La première mission des universités et des grandes écoles n’est plus le recrutement des fonctionnaires mais celle de donner à chacun directement, quel que soit son milieu d’origine, toutes les chances de trouver son domaine d’excellence, de se préparer aux métiers d’après-demain et de faire progresser le savoir. La préparation à la vie professionnelle doit donc devenir l’un des axes majeurs du projet pédagogique de tout établissement d’enseignement supérieur. C’est loin d’être le cas aujourd’hui. D’abord parce que les universités françaises disposent de beaucoup moins de moyens que celles des autres grands pays : les universités françaises reçoivent 8 700 € par étudiant en moyenne contre 36 500 € aux États-Unis. Ainsi, seules 3 universités françaises sur 86 figurent parmi les cinquante premières dans le classement de Shanghai,et seulement 15 sont dans les 100 premières. Aucune université française ne figure parmi les 100 premières mondiales en médecine et en pharmacie. Seules une ou deux universités françaises sont citées parmi les premières dans les secteurs des sciences agronomiques, informatique et sciences de l’ingénieur.

OBJECTIF Accompagner les étudiants dès leurs premières années universitaires

L’essentiel se joue dans la première année universitaire, où l’on constate beaucoup d’échecs. Les étudiants des universités sont aujourd’hui laissés pratiquement sans accompagnement, après avoir quitté le lycée où l’encadrement est très serré. C’est une des principales causes de l’échec.

DÉCISION 11

 ! Donner progressivement aux étudiants de licence à l’université un encadrement équivalent à celui des élèves de classes préparatoires aux grandes écoles.

Un accompagnement individuel de l’étudiant durant ses premières années d’études supérieures aidera à l’égalité de traitement entre les élèves de licence et ceux des classes préparatoires aux grandes écoles.

À cette fin, il conviendra de généraliser le système de tutorat déjà évoqué dans le Schéma national de l’orientation et de l’insertion professionnelle. Les universités pourront valoriser l’engagement de ces tuteurs, étudiants plus âgés, soit par sa prise en compte dans leur cursus sous forme de crédits ECTS (European Credit Transfer System), soit par une rétribution monétaire.

DÉCISION 12

 ! Généraliser l’année de stage validée au cours du cursus universitaire de master.

Tous les étudiants à l’université doivent se voir progressivement proposer une année de stage en entreprise, en France ou à l’étranger, validée comme année universitaire, au cours de leur cursus de master (sur le modèle de la plupart des grandes écoles).

Un semestre de stage devra avoir lieu au cours de la licence. Les universités qui ne l’ont pas encore mis en place doivent créer un service d’accompagnement pour la recherche de ces stages et passer des accords avec des entreprises de façon à créer une relation continue. Les entreprises elles-mêmes doivent se mobiliser

pour les accueillir, les former et les accompagner avec des tuteurs clairement désignés. Celles qui recourent de façon récurrente aux stagiaires pour occuper des postes de travail, au lieu de recruter des jeunes de façon pérenne doivent en être dissuadées. Ces stages seront organisés en liaison avec les régions. Les étudiants

en stage seront décemment rémunérés.

Pour compléter ce dispositif, les actions suivantes doivent être menées :

• Proposer une année de « remise à niveau » à l’étudiant qui rejoint l’université, que ce soit en formation initiale (exemple Paris VI) ou en formation continue (comme dans le modèle suédois), sachant que les universités américaines consacrent deux ans à une telle formation.

• Mettre en place des passerelles vers d’autres formations en fin de premier semestre universitaire.

• Proposer aux étudiants de la première année d’université, au début du deuxième semestre, entre 40 000 et 50 000 places en filières STS (Section de techniciens supérieurs) et en IUT (Institut universitaire de technologie) sur 5 ans, afin de permettre les réorientations rapides sur des filières professionnalisantes dont les débouchés sont assurés.

DÉCISION 13

 ! Renforcer les formations en alternance.

Les formations en alternance constituent déjà l’essentiel de la formation à certains métiers comme ceux de la santé. Il est opportun de généraliser ce processus pédagogique, d’utiliser l’apprentissage et le stage dans les cursus, et d’augmenter dès 2009 de 10 000 le nombre d’étudiants en alternance à l’université en 3e année de

licence sur le format de 2 jours de cours, 3 jours en entreprise ou 15 jours de cours, puis 15 jours en entreprise.

Chaque université devra aussi ouvrir des Centres de formation d’apprentis (CFA) et mettre en place des directions de l’orientation, des stages et de l’insertion.

DÉCISION 14

 ! Favoriser le retour à l’université après et pendant une expérience

professionnelle.

La formation par l’université à des compétences complémentaires ou à l’actualisation des connaissances est essentielle. L’enseignement supérieur français doit devenir un acteur majeur des formations professionnalisantes, tout au long de la vie, sur le modèle de l’enseignement supérieur suédois. Il devra devenir le premier collecteur et bénéficiaire des fonds de formation permanente.

OBJECTIF Aider les étudiants à concilier leurs études avec leur emploi

Même en développant largement les bourses et les prêts, certains étudiants continueront, par choix ou par nécessité, à travailler pendant leurs études. Ils devront être aidés par les universités à trouver des emplois correctement rémunérés utiles à leur formation et valorisés dans leurs études. Des aménagements devront aussi être prévus pour que cette activité salariée ne constitue pas un handicap pour le bon déroulement de leur cursus.

DÉCISION 15

 ! Mieux organiser avec les entreprises de la région des bourses d’emploi et de stages.

DÉCISION 16

 ! Inciter les universités à organiser des cours du soir et permettre un assouplissement des règles d’étalement des études sur une plus

longue période.

DÉCISION 17

 ! Donner aux étudiants salariés un crédit d’European Credit Transfer Systempour l’obtention de la licence, qui serait d’autant plus élevé que l’emploi est lié au cursus.

DÉCISION 18

 ! Exclure, dans la limite d’un plafond à définir, les revenus tirés d’un emploi étudiant du calcul du plafond d’éligibilité pour les bourses de l’enseignement supérieur et les allocations logement.

OBJECTIF Investir davantage dans l’enseignement supérieur

L’enseignement supérieur constitue le seul domaine où une part significativement plus élevée du budget de l’État doit être dégagée, afin de créer les conditions de la croissance future.

DÉCISION 19

 ! Renforcer l’autonomie des universités.

Malgré la réforme de l’été 2007, les universités ne sont pas encore assez autonomes ni capables de prendre les décisions les plus stratégiques pour leur avenir. Il faut aller plus loin dans la réduction du nombre de membres des conseils et organiser une plus grande autonomie dans les modes de gestion financière, de recrutement des professeurs et des rémunérations. Il faut soumettre les présidents d’université (eux-mêmes élus par des conseils indépendants) au contrôle de comités académiques ainsi qu’à l’évaluation des performances universitaires. En particulier, trois critères doivent être pris en compte au moment de l’évaluation de l’université et de la fixation de sa dotation par l’État : le succès des étudiants, l’ouverture du processus de recrutement des maîtres de conférences et les critères de promotion au grade de professeur.

DÉCISION 20

 ! Renforcer l’évaluation de la performance de chaque établissement d’enseignement supérieur.

Comme pour toute structure n’étant pas soumise aux contraintes de la concurrence, les institutions d’enseignement supérieur doivent être évaluées par une instance d’audit spécialisée, mesurant et rendant publiques la participation effective, la réussite aux examens, l’employabilité des étudiants et la recherche académique.

L’Agence d’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (AERES) créée dans ce but doit être renforcée en conséquence.

En sus des obligations d’ores et déjà prévues par la loi du 10 août 2007 (réussite aux diplômes, poursuite d’étude, insertion professionnelle des étudiants, nombre et qualité des stages), l’Agence devra veiller à informer les étudiants des taux de succès sur 3 ans dans la formation qu’ils choisissent, mesurer le bon emploi des ressources allouées à la suite du précédent exercice d’évaluation et faire participer les étudiants à l’évaluation de leurs enseignants.

Ces audits seront rendus publics annuellement à travers un classement général simple et clair organisé par un domaine d’enseignement. L’activité d’agences concurrentes d’évaluation devra aussi être encouragée.

DÉCISION 21

 ! Augmenter les moyens financiers alloués à l’enseignement supérieur, afin d’accompagner les décisions précédentes.

Même si le financement public des établissements d’enseignement supérieur est plus important en France que dans les autres pays de l’OCDE (0,8 % du PIB au Royaume-Uni, 1 % du PIB aux États-Unis et en Allemagne), le niveau actuel du financement total de l’enseignement supérieur français est inférieur à la moyenne de

l’OCDE (1,35 % au lieu de 1,39 %). Pour combler cet écart, il faudrait une augmentation de 800 millions d’euros. Pour atteindre la moyenne des 10 pays finançant le mieux leur enseignement supérieur (1,79 % du PIB), il faudrait une augmentation de 8 milliards d’euros.

Dans un contexte de nécessaire maîtrise des dépenses publiques, une telle augmentation ne pourra être demandée qu’après l’adhésion de la communauté universitaire à la démarche de performance et de transparence décrite préalablement. Il faudra donc distinguer les dotations de base (accordées en fonction des formations dispensées et du nombre d’étudiants se présentant effectivement aux examens) et les fonds destinés à récompenser les universités ayant les meilleurs résultats.

DÉCISION 22

 ! Développer les financements privés.

Les universités doivent pouvoir, dans le respect de leur indépendance académique, créer des « fondations pour l’enseignement supérieur » visant à développer des programmes d’enseignement ou de recherche, à l’instar des fondations privées de recherche, sans financement public obligatoire, leur permettant de faire bénéficier

tout de suite les donateurs – qu’ils soient des entreprises ou des particuliers – du régime fiscal des fondations.

L’université doit pouvoir, comme le fait la Fondation des Hautes études commerciales (HEC), obtenir des dons d’entreprises et de ses anciens élèves. Pour ce faire, elle devra faire appel à ses anciens élèves, suivre et communiquer sur leur cursus professionnel, informer sur le nombre d’anciens étudiants au chômage deux ans

après l’obtention du diplôme.

Par ailleurs, les frais de scolarité constituent une part très faible du financement privé des études supérieures, contrairement à la plupart des pays de l’OCDE (États-Unis, Royaume-Uni, Nouvelle-Zélande).

Dans d’autres pays, les frais de scolarité sont faibles voire nuls (Suède, Allemagne, France). Cette spécificité française doit rester inchangée.

DÉCISION 23

 ! Institutionnaliser des « Universités des métiers ».

Les concours très sélectifs sélectionnent ceux qui ont les qualités nécessaires pour les réussir : courage, organisation du travail, milieu stable, mémoire, renoncement momentané à une vie de plaisir pour n’éprouver que le plaisir de la performance et de la polarisation.

Ceux qui ont subi, à ce moment-là, une difficulté de santé, de développement, de famille ou de culture sont éliminés pour la vie. Cela constitue un gâchis de compétences, quand on connaît la plasticité de l’intelligence et la flexibilité des développements.

Beaucoup d’universités étrangères ont institutionnalisé des facultés des métiers (Laval, Sherbrooke, Canada) où des infirmières, des artisans, des sportifs, des artistes peuvent devenir professeurs ou obtenir toutes sortes de diplômes. Quand il n’y a qu’un seul moule, et que l’immobilisme et le conformisme deviennent la seule ligne de développement, il s’ensuit une vérité unique qui réduit la créativité.

Certaines « universités des métiers » existent déjà dans plusieurs universités françaises, elles doivent donc se développer.

OBJECTIF Faire émerger sur le territoire 10 grands pôles universitaires et de recherche de niveau mondial

DÉCISION 24

 ! Distinguer 10 pôles universitaires de taille mondiale alliant pluridisciplinarité et excellence.

La France a besoin d’environ 10 universités de taille mondiale (elle n’a pas les moyens d’en avoir plus de cette taille et de cette ambition).

Les autres universités conserveront, comme aux États-Unis, leur vocation régionale ou nationale.

Il convient, dans une carte universitaire nouvelle, de faire émerger par appel d’offres (à la faveur d’un processus d’évaluation mené dans chaque département universitaire et chaque établissement d’enseignement

supérieur), 10 ensembles d’excellence que l’on nommera « Pôles universitaires pluri disciplinaires » (PUP). Les départements universitaires d’excellence n’auront pas nécessairement une localisation unique. Un Pôle universitaire pluridisciplinaire pourra réunir, par un jeu d’Intranet, des lieux d’enseignement géographiquement éloignés, y compris appartenant à des pays voisins. Écoles et universités appartenant à un même Pôle universitaire pluridisciplinaire seront regroupées en réseaux, mis en commun, et leurs cursus harmonisés.

Ces Pôles universitaires pluridisciplinaires pourront résulter du rapprochement, sous gouvernance unique, de plusieurs structures d’enseignement supérieur (universités, grandes écoles…), de l’intégration juridique des structures de recherche aujourd’hui partiellement rattachées aux universités et présentes sur leurs sites (les

unités mixtes de recherche). Elles naîtront aussi du développement de synergies avec les grands établissements de recherche (Centre national de la recherche scientifique [CNRS], Commissariat à l’énergie atomique [CEA], Institut national de la santé et de la recherche médicale [Inserm], Institut national de la recherche agro- nomique [Inra]…). Elles supposeront en outre le développement de collaborations avec des structures de recherche privées. Elles accorderont enfin une place essentielle à la mobilité des chercheurs des

organismes publics, des enseignants-chercheurs de l’Université, et des centres de recherche privés.

Parmi ces Pôles universitaires pluridisciplinaires pourront être sélectionnés les Pôles de recherche et d’enseignement supérieur (PRES) dont le projet de candidature aura convaincu les pouvoirs publics. Ces derniers permettent depuis mars 2007 aux établissements d’enseignement supérieur de fédérer localement les principales activités d’enseignement supérieur et de recherche ou de rassembler des compétences complémentaires en réseau. Neuf Pôles de recherche et d’enseignement supérieur ont déjà pris la forme d’établissements publics de coopération scientifique : Aix-Marseille ; Lyon ; Bordeaux ; Toulouse ; université européenne de Bretagne ; Nancy ; université Paris Sud ; université Paris Est ; ParisTech. Dans tous les cas, il faudra faire passer progressivement de 12 500 à 25 000 le nombre d’étudiants de ParisTech et quadrupler les promotions de l’École normale supérieure, de l’École polytechnique et de quelques autres grandes écoles, qui devront s’inscrire dans ces pôles.

Ces Pôles universitaires pluridisciplinaires devront aussi développer des enseignements à distance de qualité et consacrer une part significative de leurs budgets à la mise en ligne de leurs cours, et à l’organisation de séminaires pour les entreprises qui les rémunéreront pour bénéficier de leur formation permanente.

L’émergence de ces 10 Pôles universitaires pluridisciplinaires prendra nécessairement du temps. Une fois fixées les règles du jeu, ces établissements bénéficieront d’une période d’au moins cinq ans au cours de laquelle ils mettront en place leurs nouveaux projets pédagogiques et de recherche, et à l’issue de laquelle seront effectuées à nouveau les comparaisons entre départements universitaires qui guideront la fixation du périmètre des nouveaux Pôles universitaires pluridisciplinaires.

Pour structurer ces 10 pôles, 10 nouveaux campus de standard mondial et bénéficiant d’une dotation foncière de l’État seront créés. Ils seront dotés d’infrastructures (logement, bibliothèques, etc.) permettant

un accueil de qualité des professeurs, des chercheurs et des étudiants recrutés internationalement sur des critères d’excellence. Ils seront le coeur de l’enseignement à distance que ces hyperuniversités devront mettre à disposition du reste des étudiants du pays.

Les investissements nécessaires pour ces 10 campus pourraient atteindre 10 milliards d’euros, à engager en 7 ans avec des coûts de fonctionnement annuels de l’ordre de 0,7 milliard d’euros. Ces financements pourraient être portés par la Caisse des dépôts et consignations, qui s’est déjà déclarée prête à apporter un financement

en capital de 7 milliards d’euros. Il est aussi envisageable de mobiliser pour ce projet des Partenariats Public-Privé. L’ensemble de ces financements conduira ensuite à mobiliser des financements publics sous la forme de loyers, ce qui permettra de lisser cet investissement nécessaire dans le temps.

OBJECTIF Ouvrir l’enseignement supérieur à l’international

DÉCISION 25

 ! Proposer, lors de la présidence française de l’Union européenne, de mettre en place un classement annuel des universités européennes.

DÉCISION 26

 ! Développer les cursus en langues étrangères.

Même si l’ensemble des formations doit rester en français, il serait utile de développer des enseignements et des cursus d’abord en anglais, et également en arabe, espagnol et chinois, afin de mieux préparer les étudiants français à la mondialisation et d’attirer des étudiants étrangers.

DÉCISION 27

 ! Améliorer l’accueil des étudiants, des enseignants et des chercheurs étrangers, et revoir la politique de visas les concernant.

Les étudiants étrangers qui désirent venir étudier dans nos universités doivent être recrutés et accompagnés avant même leur arrivée. En particulier, des services spécifiques visant à leur faciliter les démarches administratives doivent être prévus à l’intérieur de chaque université. Il convient aussi de mettre en place une politique de visas beaucoup plus souple pour les enseignants et les chercheurs étrangers.

DÉCISION 28

 ! Ouvrir davantage l’enseignement supérieur sur le monde.

• Proposer à nos partenaires européens, lors de la présidence française de 2008, de développer les moyens d’Erasmus et de Socrate, d’étendre les bourses aux échanges extra-européens, en particulier méditerranéens, et d’en faire également bénéficier les universités de métiers.

• Inciter les universités françaises à ouvrir des antennes à l’étranger (exemple de la Sorbonne à Abou Dhabi).

• Favoriser la mobilité internationale des professeurs, des chercheurs et des étudiants.

• Offrir à nos meilleurs chercheurs partis à l’étranger l’opportunité et les moyens de revenir créer et diriger des équipes dans des conditions équivalentes à celles offertes par les meilleures universités étrangères.

OBJECTIF Rendre notre recherche plus compétitive

La stratégie de Lisbonne, définie en 2000 par l’ensemble des pays membres de l’Union européenne, a donné comme objectif à l’Europe d’être l’économie la plus compétitive du monde d’ici 2010.

Pour y parvenir, l’objectif a été fixé pour chaque pays de consacrer 3 % de la richesse nationale à la Recherche et au Développement. Or, à ce jour, cet objectif n’est pas atteint pour la France (2,2 % du PIB contre 2,7 % aux États-Unis, 3,1 % au Japon et dans les pays scandinaves et 2,4 % en Allemagne), en raison notamment du

faible niveau de l’investissement privé dans ce domaine (1,2 % du PIB, contre 2,3 % au Japon, 2 % aux États-Unis et 1,7 % en Allemagne).

La proportion de chercheurs dans la population active est de 7 chercheurs pour 1 000 actifs contre 10 dans les pays nordiques, le Japon et les États-Unis. Seulement 53 % des chercheurs sont employés dans le secteur privé contre 60 % dans les pays nordiques et 80 % aux États-Unis. Si la production scientifique française représente 4,7 % des publications mondiales, elle est souvent insuffisamment valorisée et seuls quatre secteurs se situent au-dessus de la moyenne mondiale : les sciences de l’ingénieur, les mathématiques, la physique et la biologie appliquée.

Le système français de recherche est trop complexe : un Centre national de la recherche scientifique peu évalué par l’extérieur, des chercheurs travaillant trop souvent sans lien direct avec l’enseignement, une insuffisance de grands projets et de coordination entre les établissements spécialisés, dans une extrême dispersion. De plus, le financement, majoritairement issu de financements récurrents, n’est pas lié aux résultats des équipes de recherche tandis que les unités mixtes, soumises à des contrats quadriennaux, placent de fait la recherche universitaire sous la tutelle du CNRS.

Un pilotage stratégique fort par l’État est nécessaire pour fixer les grandes orientations de recherche et faire émerger l’excellence dans certains domaines délibérément choisis.

DÉCISION 29

 ! Financer davantage la recherche publique sur projet et à la performance.

Clarifier les missions respectives du Centre national de la recherche scientifique (CNRS) et de l’Agence nationale de la recherche (ANR).

Le CNRS doit se concentrer sur ses laboratoires propres et sérieusement réduire le nombre de ses unités mixtes afin d’éviter l’émiettement de ses chercheurs et de ses ressources. Seuls les laboratoires les plus stratégiques au plan international (les grandes plates-formes en particulier), définis après avis d’un comité composé exclusivement de très grands spécialistes étrangers, resteront des instituts du CNRS.

L’Agence nationale de la recherche doit renforcer sa fonction d’agence de moyens afin de définir et de conduire des grands projets à court terme (3 ans), et disposer de ressources nécessaires pour les conduire. Les jurys qui décident, au sein de l’Agence nationale de la recherche, de l’attribution de ces financements doivent être constitués des meilleurs scientifiques et chercheurs internationaux. Les projets doivent être financés à coûts complets, contrairement aux pratiques actuelles.

Renforcer les principaux organismes de recherche pluridisciplinaires (Commissariat à l’énergie atomique) et spécialisés (Institut national de la recherche agronomique, Institut national de la santé et de la recherche médicale, Institut national d’études démographiques) disposant de grands équipements.

• Organiser des financements à la performance : comme pour les universités, la dotation récurrente d’un établissement de recherche doit être pour partie liée à la performance passée de l’établissement.

• Instituer des financements incitatifs pour les grands projets ou les financements communautaires (Programme cadre de recherche et de développement pour lequel la recherche française est en moyenne moins performante que la recherche allemande ou anglaise).

• L’ensemble des unités de recherche (dans les établissements publics à caractère scientifique et technologique ou organismes de recherche) et des unités d’enseignement et de recherche (dans les universités) doivent pouvoir être financées pour une partie significative de leur budget à partir de ces financements innovants. Les organismes de recherche spécialisés (Institut national de la recherche agronomique, Institut national de la santé et de la recherche médicale, Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer) ou pluridisciplinaires (CNRS) pour leurs laboratoires propres, de même que les universités (pour la part de leur activité consacrée à la recherche), conserveront une part de financement « récurrent ».

• Rapprocher le fonctionnement de tous les établissements publics de recherche des meilleures pratiques du secteur privé (évaluation, promotion, mobilité, flexibilité de fonctionnement, etc.).

• Simplifier les dispositifs de rémunération complémentaire sur contrat des chercheurs du secteur public et moduler les obligations de service des enseignants-chercheurs en fonction de leur activité de valorisation de la recherche.

Une fois les Pôles universitaires pluridisciplinaires en place, le schéma devra évoluer vers un ensemble d’agences spécialisées par grands thèmes conjuguant le rôle d’agence de financement pour des équipes universitaires externes, sur appel d’offres, et le support de ses laboratoires propres, sur les modèles, efficaces, des États-Unis comme de la Grande-Bretagne.

DÉCISION 30

 ! Réformer le statut d’enseignant-chercheur.

Personne ne devrait pouvoir être chercheur à vie sans enseigner, à moins d’obtenir de façon spécifique des dérogations sur la base des performances de recherche récentes.

• Recruter et financer (salaires, frais de fonctionnement et équipements) tous les nouveaux chercheurs sur des contrats de 4 ans. À l’issue de cette période, une évaluation décidera si le projet pourra être prolongé. Aucun chercheur ne devra bénéficier de plus de deux (ou, exceptionnellement, trois) contrats de quatre ans successifs. Au bout de cette période, le chercheur pourrait évoluer vers un contrat à durée indéterminée de « directeur de recherche », vers une activité d’enseignement, ou vers l’entreprise privée.

• Attirer et conserver les meilleurs chercheurs par un niveau plus attractif de salaires (à travers des primes fortement modulables, des Contrats à durée indéterminée (CDI) et des accélérations de carrière) et des financements de leurs projets de recherche.

DÉCISION 31

 ! Aider la recherche publique à davantage valoriser et appliquer ses découvertes.

La capacité du secteur concurrentiel à exploiter la connaissance produite par la recherche publique dépend de la qualité de ses propres chercheurs et de sa capacité à contracter avec les laboratoires publics. Les contrats des organismes de recherche avec les entreprises ne représentent en France que 3 % de leur budget contre 16 % en Allemagne et 6 % au Royaume-Uni. Bien que le nombre de dépôts de brevets ait augmenté, les revenus liés à la propriété intellectuelle ne représentent que 1 % du budget de la recherche en France, contre 3 à 5 % du budget de la recherche aux États-Unis.

Les structures en charge de la valorisation sont trop petites. Le système des incubateurs et des fonds d’amorçage est trop complexe. Il souffre d’un manque de réactivité en matière de transfert de technologie, d’un cloisonnement des structures, de niveaux d’activité et de sélectivité insuffisants.

• Dispenser davantage d’enseignements de gestion aux chercheurs.

• Créer des offices mutualisés, mandatés par région ou par secteur, pour valoriser les brevets d’un ensemble d’établissements sur un site géographique ou dans une discipline donnée.

• Imposer, pour les unités mixtes de recherche, un délégataire unique de transfert et de valorisation parmi les tutelles de l’unité.

• Simplifier les procédures et réduire les délais nécessaires au financement des projets sélectionnés (aujourd’hui un an).

• Imposer aux établissements et organismes de recherche de consacrer à la valorisation de la recherche 10 % de leur budget récurrent, pour les amener à apporter la preuve du concept de leurs innovations.

DÉCISION 32

 ! Développer la recherche privée.

Une première étape a été franchie avec la réforme du crédit impôt recherche, dont on peut attendre beaucoup. Des efforts supplémentaires peuvent être menés pour en maximiser les effets :

• Inciter les grandes entreprises à maintenir leurs laboratoires de recherche en France.

• Simplifier les dispositifs d’allégement des charges qui, en pratique, imposent des conditions d’éligibilité restrictives (15 % des dépenses en recherche) et ne servent que les « Jeunes Entreprises innovantes » du secteur des services aux entreprises, au détriment des entreprises industrielles.

• S’attacher à faire revenir des chercheurs français dans le secteur privé.

• Ouvrir les conseils des écoles doctorales à des représentants d’entreprises intéressées et utiles à l’activité de recherche.

• Focaliser les relations de recherche entre secteurs public et privé dans les pôles de compétitivité.