L’Association "Sauvons la Recherche" Groupes de travail Comités loc. et transv. Université de printemps 2011 EUROPE
Accès thématique Emploi et précarité Communiqués de SLR Actualités communiqués partenaires
Médiathèque Les archives Documentation revue de presse Tribunes et Contributions
accueil contact plan du site admin
caractères +caractères -
article
réactions (4)
Accueil / Actualités / Vers un CNRS sans biologie à partir de 2009 ?

Vers un CNRS sans biologie à partir de 2009 ?

le 5 novembre 2008

Résumé

Depuis Octobre 2007, l’organisation de la recherche française en sciences du vivant (SDV) est devenue un enjeu politique et c’est ce que je voudrais expliquer dans cet article, en insistant en particulier sur les enjeux de ce qui se joue dans les prochains jours, qui pourrait conduire à la « sortie » de la biologie du CNRS ou à son affaiblissement considérable. Après quelques brefs rappels historiques, je décrirai l’organisation de la recherche en sciences du vivant en France et évoquerai rapidement l’organisation américaine dans ce domaine. Dans les chapitres 3 et 4, je rappellerai d’une part différentes décisions gouvernementales et interventions d’acteurs divers dans le domaine de la recherche en SDV depuis Octobre 2007, date de la nomination d’un nouveau directeur à l’INSERM et essaierai de montrer le rôle clé de l’Elysée dans l’évolution récente des SDV. Le chapitre 5 sera consacré à la commission Pécresse de « mise en œuvre du plan stratégique du CNRS » qui rendra ses conclusions le 10 novembre 2008, dont une partie concerne directement la recherche en SDV. Avant de conclure sur ce dont aurait besoin la recherche en biologie et sur quelques prospectives, je comparerai les arguments respectifs des tenants d’un nouvel institut unique pour les sciences du vivant et de ceux qui tiennent au contraire à ce que tous les acteurs institutionnels continuent à jouer leur rôle et renforcent leur coopération.



Version 2.1, Vendredi 14 Novembre 2008, 21h
Une version pdf de cet article est disponible ici
PDF - 243.6 ko
Vers un CNRS sans biologie en 2009 ? par Bernard Jacq, version 2.1, 14/11/2008

[ Dernières Nouvelles, Lundi 1er Décembre, 17h30 ]
Le très attendu rapport Godet sur les SDV a été rendu public par Libération mais pas encore par le Ministère !

Il est accessible ici.
Une version pdf est disponible ci-dessous, à côté du rapport d’évaluation de l’INSERM par l’AERES.
Deux commentaires après une lecture rapide :
  • Après lecture du rapport, remplacez dorénavant le point d’interrogation du titre de mon article par un point d’exclamation !
  • un texte atterrant ! Heureusement que certains membres de la commission se sont désolidarisés d’une partie du texte principal et que leurs principaux arguments sont rendus publics dans le rapport !
    Joyeuse lecture .... Le démantèlement du CNRS est la conséquence inévitable de ce rapport s’il était appliqué. Et le rapport propose une échéance claire : 2 ans ! Une réaction de SLR sous forme d’un communiqué viendra très vite. Mais par ailleurs, une réaction très vigoureuse des biologistes serait évidemment souhaitable !

Samedi 29 Novembre, 13h30
Le rapport du groupe de réflexion sur les SDV, présidé par Jacqueline Godet (et dans lequel figuraient 5 membres ayant signé la pétitition pour un institut unique de la biologie) a transmis son rapport vendedi 28 au ministère. Nous attendons que ce dernier le rende public en début de semaine.

Lundi 24 Novembre, 12h.Le groupe de réflexion sur les SDV, présidé par Jacqueline Godet et qui devait originellement rendre ses conclusions lundi 10 Novembre puis lundi 17 Novembre ne les a toujours pas rendues le 24 Novembre. Comme dans un parti politique que nous ne nommerons pas (...), il semble que la synthèse soit difficile. Et les votes n’ont pas encore eu lieu ... .

Vendredi 14 Novembre
Le comité AERES d’évaluation de l’INSERM, présidé par Elias Zerhouni, ancien directeur des NIH, a (enfin) rendu son rapport. Ses conclusions vont largement plus loin que le strict périmètre de l’INSERM et, comme nous le craignions, il préconise la création d’un seul institut de biologie, ce dont se félicite A. Syrota, DG de l’INSERM. Le texte du comité d’évaluation AERES ainsi que la réponse d’A. Syrota sont accessibles ci-dessous.

Il faut savoir qu’ au milieu de sa visite, le comité d’évaluation de l’INSERM a été transporté en bus à l’élysée (si, si, c’est vrai, ce n’est pas une galéjade !) où il a directement été briefé par le président et son conseiller à la biologie et à la santé, A. Munnich ... Eh oui, c’est ca maintenant, l’évaluation indépendante à la française ....

Ce rapport du comité d’évaluation de l’INSERM contient de véritables "bombes" dont voici un petit assortiment.
"Le comité a bien entendu conscience du fait qu’un transfert soudain et immédiat vers les universités serait perturbateur, mais il se déclare clairement en faveur de l’intégration de toutes les unités situées dans les universités en leur sein à la mesure de l’évolution de leurs capacités de gestion après une période de transition suffisante."

"Par exemple, nous recommandons que les opérations de recrutement à venir soient effectuées exclusivement par les entités qui assumeront à terme la gestion et la responsabilité des programmes de recherche, qu’il s’agisse de l’université ou de l’institut qui héberge l’unité , ..."

"Ces deux rôles, à savoir la gestion et le financement de la recherche, doivent être clairement séparés pour optimiser le fonctionnement du système. "

"Pour ce faire, le comité recommande vivement de créer un Institut national unique pour la recherche dans le domaine des sciences de la vie et de la santé. Cet institut, ne devrait avoir, de préférence, aucune responsabilité de gestion et être dédié au pilotage et au financement de la recherche nationale dans ce domaine pour tous les opérateurs du secteur. Il devrait avoir pour responsabilité de financer au mérite les projets, les laboratoires et les institutions de manière appropriée, et indépendamment de l’affectation des chercheurs à l’origine du projet."

"Le comité recommande fortement de choisir l’INSERM comme entité d’intégration de toutes les organisations et fonctions de financement actuellement fragmentées et qu’il devienne, après une période de transition, le nouvel institut en question."

"Le comité recommande de trouver les moyens propres à augmenter les salaires des directeurs des instituts, des dirigeants des universités et des chercheurs / enseignants-chercheurs qui réussissent à obtenir des subventions auprès des agences de financement ou d’autres sources externes. "

Tous ceux et celles qui ne veulent pas que la biologie du CNRS, de l’INRA et de l’IRD fasse les frais de cette OPA inamicale doivent maintenant s’organiser d’urgence.
Suivez la une du site SLR. D’ores et déjà il y a appel à des manifestations le 20 et le 27 novembre. Un CA de SLR a lieu mercredi 19 Novembre

PDF - 835.2 ko
Rapport Evaluation de l’INSERM par l’AERES-2008.pdf
PDF - 31.8 ko
Réponse A. Syrota au comité de visite AERES de l’INSERM
PDF - 185.6 ko
Rapport Godet SdV-28/11/08

Sommaire

1- La biologie est partie intégrante du CNRS depuis sa création et en constitue un axe scientifique majeur

2- Outre le CNRS, de nombreux acteurs institutionnels sont impliqués dans la recherche en
sciences du vivant

3- Fin 2007, un bouleversement annoncé pour les sciences du vivant

4- L’avion de la biologie n’est pas piloté par le ministère mais par l’Elysée

5- La commission Pécresse de « mise en œuvre du plan stratégique du CNRS » et ses groupes de réflexion

6- Un ou plusieurs instituts en sciences du vivant ?

7- De quelles réformes aurait réellement besoin la recherche en sciences du vivant ?

8- Et maintenant ?


Sommes-nous maintenant engagés sur la voie d’un nouveau CNRS où il n’y aura bientôt plus en son sein de recherches en sciences du vivant ?

Pour n’importe quel personnel du CNRS, de l’enseignement supérieur et de la recherche, pour la plupart des étudiants, mais aussi pour beaucoup des citoyens de ce pays s’intéressant à la culture scientifique, aux nouvelles technologies ou au monde de l’éducation et de la recherche, le simple fait de poser cette question pourrait apparaître totalement surréaliste.

Et pourtant, … c’est ce qui risque de se passer à partir du 10 novembre prochain. Cette date pourrait bien être le début de la « dé-biologisation » du CNRS, qui serait alors le premier signe clair et tangible du démantèlement de l’organisme et annonciateur de sa fin prévisible.

Comment a t-on pu en arriver là et doit-on se contenter d’être spectateurs du désastre ?

1- La biologie est partie intégrante du CNRS depuis sa création et en constitue un axe scientifique majeur

Avant d’expliciter les tenants et aboutissants de cette situation proprement incroyable et extrêmement préoccupante qui pourrait voir la biologie « quitter » le CNRS (qui perdrait ipso facto son statut d’établissement de recherche où sont représentées toutes les branches de la connaissance scientifique), quelques mots rapides d’histoire récente des sciences : Il faut rappeler au lecteur (ou lui apprendre …) que dès les premiers pas du CNRS (créé en octobre 1939 par des physiciens parmi lesquels Jean Perrin et Pierre Augé), la biologie en a rapidement été une composante significative. Ainsi, dans son numéro de novembre 1999, portant sur la création du CNRS, la revue d’histoire du CNRS montre des fac-similés de documents de l’époque attestant de l’importance de la recherche en biologie dans l’organisme dès ses débuts [1].

Depuis lors, cette importance de la biologie dans l’organisme n’a pratiquement cessé de croître pour atteindre aujourd’hui 25% de ses moyens budgétaires et humains (près de 8300 personnels dont 4360 du CNRS (2280 chercheurs et 2080 ITA). Ces personnels, auxquels il faut ajouter plus de 5000 étudiants, post-docs et CDDs, travaillent dans 215 unités de recherche et de service et 86 regroupements d’unités et structures fédératives [2].
Toutes les grandes métropoles régionales abritent des laboratoires du CNRS en sciences de la vie, ceux-ci contribuant à la fois au maillage du territoire en recherches en sciences du vivant et étant aussi des atouts importants pour développer des partenariats industriels.
Comme nous le développerons plus loin, le CNRS n’est pas le seul acteur en recherche en sciences du vivant. Il en est cependant un acteur incontournable et le plus important en biologie fondamentale que cela soit mesuré par des indicateurs de nombre de publications totales, de publications dans les revues à plus fort facteur d’impact [3], de découvertes fondamentales (pour ne citer que deux exemples récents, les virus géants et les picobiliphytes, algues du pico plancton ont été découvertes dans des laboratoires CNRS ou par des chercheurs du CNRS). Au niveau international, sur les 78 candidats retenus lors de l’appel à candidatures ERC (European Research Council), 9 lauréats seront accueillis en France et parmi eux, 7 sont chercheurs CNRS et rattachés au département des Sciences du vivant ou accueillis dans un laboratoire rattaché au département des Sciences du vivant.
Pour clore ce très bref aperçu, rappelons enfin que les six biologistes français honorés par le prix Nobel de Médecine et Physiologie depuis que le CNRS existe (François Jacob, André Lwoff, Jacques Monod 1965 ; Jean Dausset, 1980 et Françoise Barré-Sinoussi et Luc Montagnier cette année) ont tous soit travaillé dans des laboratoires du CNRS, soit encore étaient ou sont des chercheurs du CNRS.

C’est donc dire que par son histoire, par son aspect structurant, par les multiples interactions que le département SDV du CNRS a pu nouer avec tous les autres départements du CNRS sans exception (pour le développement de l’interdisciplinarité, enjeu essentiel du futur) et enfin par son importance numérique dans l’établissement, la recherche biologique est une cellule de base du tissu du CNRS.

2- Outre le CNRS, de nombreux acteurs institutionnels sont impliqués dans la recherche en biologie

Beaucoup l’ignorent, mais la recherche publique française en biologie mobilise plus de 30 000 personnes. En effet, outre le CNRS, plusieurs autres acteurs majeurs interviennent dans cette recherche. Il s’agit tout d’abord (et numériquement) de l’INRA (Institut National de la Recherche Agronomique), de l’INSERM (Institut National de la Recherche Médicale), du CEA Commissariat à l’Energie Atomique), de l’IRD (Institut de Recherche pour le Développement) et bien sûr des universités. A cela on peut aussi ajouter d’autres acteurs qui, bien que de façon plus marginale, ont aussi une activité de recherche où mettent des moyens au service de la biologie : citons ainsi l’INRIA, Istitut de Recherche en Informatique et en Automatismes, qui abrite plusieurs équipes de Bioinformatique) et l’IFREMER (Institut Français de Recherche pour l’Exploitation de la MER) qui met des moyens importants au service de la recherche océanographique, dont un secteur important est la biologie marine.
S’il y a d’aussi nombreux acteurs publics, c’est que la recherche biologique est très diversifiée, mais aussi et surtout que ces acteurs ont en fait des missions très différentes et spécifiques.

  • Le CNRS est seul à avoir la mission d’effectuer des recherches fondamentales dans tous les secteurs des sciences du vivant (Rappelons que plus de 8300 personnes travaillent au CNRS en sciences du vivant, cf 1er chapitre).
  • L’INRA [4] développe à la fois une recherche fondamentale mais surtout finalisée en agriculture et agronomie (en particulier : alimentation, environnement, zootechnie, santé animale, science du sol, amélioration et protection des plantes, recherches forestières ...).
  • L’INSERM [5] est placé sous la double tutelle du ministère de la Santé et du ministère de la Recherche. C’est le seul organisme public de recherche français entièrement dédié à la santé humaine (recherche fondamentale en biologie humaine, recherche clinique, recherche thérapeutique ou diagnostique, recherche en santé publique). Il a récemment été réorganisé en 8 instituts thématiques. Il est intéressant de remarquer que l’INSERM a été très largement autonome dans sa réorganisation, ce qui, comme nous le verrons plus loin, n’est absolument pas le cas du CNRS qui est lui très largement « assisté ».
  • L’IRD [6] a, dans ses domaines d’activité une forte représentation des sciences du vivant à travers l’étude des relations entre l’homme et son environnement dans les pays du Sud (en Afrique, Amérique Latine, Asie et dans l’Outre-mer tropical français), avec l’objectif de contribuer à leur développement. Les travaux portent notamment sur les ressources et écosystèmes des milieux naturels terrestres et des milieux aquatiques, continentaux et marins, dans une optique de développement et de gestion durables, l’amélioration des productions végétales et tropicales ainsi que sur les rapports entre société et santé (grandes endémies développement urbain, pauvreté et ses déterminants, interactions société/risques environnementaux).
  • Le CEA [7] a une place plus particulière puisque, contrairement aux autres organismes décrits ci-dessus (qui sont des EPST : Etablissement Public Scientifique et Technique), le CEA est un EPIC (Etablissement Public Industriel et Commercial). Les missions principales de la direction des sciences du vivant (DSV) du CEA sont de développer des recherches visant à utiliser les méthodologies issues du nucléaire pour développer les technologies pour la santé et en particulier comprendre les effets sur le vivant des rayonnements et des toxiques issus des activités nucléaires.
  • Et bien sûr, last not least, il faut citer la majorité des universités du pays ainsi que plusieurs écoles d’ingénieurs, responsables tout d’abord de la formation des futurs chercheurs en sciences du vivant mais aussi fortement impliquées dans la recherche. Elles le sont d’une part grâce aux enseignants chercheurs dont le nombre est (globalement) supérieur à celui des organismes (même si tous ne font pas de recherche). Elles le sont ensuite à travers les nombreuses UMR dont elles disposent avec les organismes précités, mais aussi à travers leurs équipes de recherche associées : plus de 80 % de la recherche publique du pays est faite sur des campus universitaires.

Nous reviendrons plus loin sur l’actualité et en particulier (car c’est la raison de fond de cet article) sur la tentative, à nos (SLR) yeux dangereuse et irréaliste, de rassembler toute la recherche biologique française au sein d’un seul organisme. Parmi les raisons invoquées par les tenants de cette proposition, l’une tient justement à la « complexité » de l’organisation de la recherche française en sciences du vivant où l’implication de multiples entités différentes n’aurait, selon eux, aucun équivalent dans le monde et dont « l’émiettement » serait la cause de performances jugées médiocres.

Rien n’est en fait plus faux et dans aucun pays développé, la recherche en biologie n’est l’apanage d’un organisme unique. Si l’on prend par exemple le cas des Etats-Unis, il y a au moins 5 acteurs qui organisent et financent cette recherche : Tout d’abord la NSF (National Science Foundation), une agence gouvernementale qui finance recherche et enseignement dans tous les domaines scientifiques non-médicaux à hauteur d’environ 20% (budget 6.02 milliards $). Ensuite le NIH (National Institute of Health, et dont l’équivalent français serait l’INSERM), constitué de 20 instituts spécialisés qui totalisent au niveau budgétaire presque 30% (environ 28 milliards $) des sommes consacrées à la recherche biomédicale. De manière peut-être plus surprenante, le DOE (United States Department Of Energy), un département gouvernemental responsable de la politique énergétique et de la sûreté nucléaire est un acteur-clé de la recherche biologique principalement au niveau de la technologie : il soutient financièrement plus de recherche fondamentale que tous les autres acteurs [8]. Dans le domaine de l’agriculture, c’est l’ARS (Agricultural Research Service) qui est l’agence de recherche de l’USDA (United States Department of Agriculture). En personnel et budget, sa taille est assez comparable à celle de l’INRA (2100 chercheurs et 6000 employés, 1.1 milliard $ en 2007).

Enfin, bien sûr, les universités sont les acteurs principaux de la recherche dans laquelle, en fonction de leurs ressources propres, elles peuvent investir des sommes considérables [9].
Cet exemple n’est pas unique et, sans le développer, on pourrait aussi citer l’exemple de la Grande-Bretagne, où sur les 7 « research councils » qui financent la recherche publique, 4 financent différents aspects de la recherche en sciences du vivant [10]. A côté de ces conseils existe aussi le NIHR (National Institute for Health Research) qui est l’équivalent britannique de l’INSERM.

La multiplicité d’acteurs ne peut donc en aucune manière être reconnue comme une source d’inefficacité, la recherche biologique américaine étant reconnue comme la meilleure au monde et celle du Royaume-Uni comme la meilleure en Europe.

3- Fin 2007, un bouleversement annoncé pour les sciences du vivant

Alors que rien ne le laissait vraiment prévoir, la question de l’organisation des recherches en sciences du vivant en France va s’inviter sur le devant de la scène en Octobre 2007. Le 12 octobre de cette année, André Syrota, jusqu’alors directeur du département sciences du vivant du CEA depuis 1993 est nommé directeur général de l’INSERM en remplacement de Christian Bréchot, démissionnaire. Mais cette nomination ne vient pas toute seule. Il apparaît rapidement qu’elle a pour objectif final de regrouper les différents instituts français de la recherche biomédicale (dont les Départements des sciences de la vie du CNRS, du CEA, et l’INSERM) en un seul organisme. Valérie Pécresse veut affirmer le rôle de l’Inserm comme coordonnateur de la recherche « biomédicale », pour en faire un acteur intégré, au périmètre élargi qui assure la continuité entre recherche fondamentale et recherche clinique.
En février 2008 sont créés huit instituts thématiques au sein de l’INSERM [11], dont les directeurs sont nommés fin avril. Et du côté du CNRS, les choses vont également s’accélérer d’une façon inattendue : 6 anciens directeurs du département des sciences de la vie du CNRS [12] publient en mai une lettre demandant la création d’un l’Institut des Sciences de la Vie et de la Santé « ayant reçu mission de définir une stratégie d’ensemble, claire et ambitieuse pour les sciences du vivant ». [13] Alors qu’une telle création devrait donc logiquement signifier une fusion du département SDV du CNRS et de l’INSERM, les signataires écrivent au contraire : « Cette création assurerait la reconnaissance par la nation de la recherche fondamentale comme démarche essentielle des organismes de recherche et reconnaîtrait à chacun de ces organismes ses spécificités et compétences scientifiques. Ainsi, loin de conduire à un démembrement des organismes de recherche concernés, elle préserverait leur rôle stratégique et opérationnel ainsi que leur identité au niveau international ».
La situation est si peu claire que quelques jours plus tard, le 26 mai, est lancé par plusieurs chercheurs un appel demandant la création au CNRS d’un Institut national de Biologie [14]. Cet appel est assorti d’une pétition qui en quelques jours rassemble près de 2000 signatures [15] parmi lesquelles figurent plusieurs biologistes internationalement reconnus et pratiquement 50% des directeurs d’unités CNRS en SDV. Beaucoup de chercheurs craignent en fait que loin de défendre la recherche fondamentale, la création de l’Institut des Sciences de la Vie et de la Santé ne signifie un développement des recherches finalisées en santé humaine au détriment de celle-ci et souhaitent confirmer le rôle irremplaçable du CNRS en recherche fondamentale.
Le 10 juillet, une contre pétition des tenants d’un institut unique est lancée [16], qui appelle à « Construire sans tarder un Institut National des Sciences du Vivant ». Elle obtient seulement un succès numérique d’estime (moins de 460 signataires à ce jour), mais est, elle aussi, soutenue par plusieurs biologistes de renom.

La communauté, bien que majoritairement favorable au maintien de la biologie fondamentale dans le giron du CNRS, est donc actuellement divisée sur cette question, mais sans en avoir réellement débattu. Nous reviendrons plus loin sur les arguments respectifs en faveur ou en défaveur d’un institut unique pour les sciences du vivant.

4- L’avion de la biologie n’est pas piloté par le ministère mais par l’Elysée

Même si on avait voulu s’en défendre, s’agissant d’un sujet a priori uniquement scientifique, il s’avère de fait nécessaire, à un moment donné, d’entrer dans une analyse politique de la situation de la recherche en biologie. En effet, depuis son élection à la présidence de la république et même bien avant cela, Nicolas Sarkozy s’est largement exprimé sur sa vision de la recherche française et aussi, de façon plus surprenante, sur son idée de la biologie.
Aussi étonnant que cela puisse paraître, et pour la première fois sous la cinquième république, le cabinet de la présidence de la république accueillait en mai 2007 un conseiller en génétique, le Pr. Arnold Munnich [17]. Pourquoi diable une telle nomination ? Pour inculquer des notions de génétique au président ? Probablement pas, même si ce ne serait pas tout à fait inutile [18]. En fait, Arnold Munnich va être un atout important dans la stratégie de réforme de la recherche de Nicolas Sarkozy. Dès février 2007, soit 3 mois avant l’élection, une tribune signée A. Munnich sur le site électoral de N. Sarkozy [19] trace déjà les grandes lignes de ce que sera (et de ce qu’a effectivement été !) l’action du futur président en ce domaine. En juin 2007, rapidement après l’élection, A. Munnich annonce de futurs changements profonds dans la recherche biomédicale [20]. On ne parle donc plus de biologie ou de sciences du vivant, mais bien de « recherche biomédicale ». Ce glissement sémantique (que tous les végétalistes apprécieront …) n’est pas neutre, il prépare de futures annonces plus précises. Et celles-ci s’avèrent … décoiffantes. Ainsi en Novembre 2007, en ouverture de la troisième journée de la recherche clinique hospitalière de l’AP-HP (Assistance Publique des Hôpitaux de Paris), il laisse entendre qu’en matière de recherche biomédicale, c’est maintenant dans les UFR médicales que vont se passer les choses importantes [21]. Ne nous y trompons donc pas : pour beaucoup d’aspects de la recherche, et notamment pour tout ce qui concerne la biologie, c’est au 55, rue du faubourg saint-Honoré et non au 1, rue Descartes que se décident les choses essentielles ! On connaissait le Dr Arnold, généticien hospitalier de talent, nous apprendrons donc à connaître Mister Munnich, conseiller du président !

Le président, à qui même la nature ne doit pas résister, veut marquer son quinquennat par la réalisation d’avancées médicales majeures, un objectif louable au demeurant. Mais même si personne ne conteste que des progrès en recherche médicale nécessitent en général des efforts financiers conséquents, personne ne semble avoir réussi (tenté ?) à (de) convaincre le président qu’ils ne sont pas suffisants et qu’on ne planifie pas les découvertes … Qu’à cela ne tienne : Le président Chirac avait le plan cancer, le président Sarkozy aura le plan Alzheimer, qui, après une gestation de plusieurs mois, est finalement annoncé le 1er février 2008 avec des moyens conséquents (il voudrait même que ce soit maintenant un effort européen…). Et comme on n’est jamais trop prudent, autant mettre toutes les chances de son côté, ne pas disperser son énergie en efforts inutiles et faire des recherches dignes de ce nom : foin de tous ces biologistes qui étudient des phénomènes ou objets exotiques comme la vie des abysses ou l’hypothétique vie extra-terrestre, se demandent comment des cellules se divisent asymétriquement, traquent la vie bactérienne et virale ignorée des océans, s’intéressent au stress des plantes ou encore se passionnent pour la sexualité des mouches drosophiles, il faut maintenant « chercher utile », c’est à dire faire du « biomédical ». Or cela n’ira pas nécessairement tout seul. En effet, le CA du CNRS a inscrit, sous la pression de plusieurs groupes de scientifiques, la phrase suivante dans son plan stratégique « horizon 2020 » [22] adopté le 1er Juillet : «  Toutes les disciplines actuellement représentées au CNRS ont vocation à y rester et à se structurer en instituts. (page 5) ».

Celà vaut donc en particulier pour la biologie et voilà qui menace donc la vision « biomédicale » des SDV qui auraient dû rallier l’INSERM nouveau. Il va falloir agir, et c’est Valérie Pécresse qui en est chargée pour remettre la « recherche biomédicale » sur les vrais rails du progrès.

5- La commission Pécresse de « mise en œuvre du plan stratégique du CNRS » et ses groupes de réflexion

Ce n’est plus un secret, le président - et donc la ministre - veut que la recherche finalisée devienne la norme dans notre pays et c’est ce qu’il clame à longueur de ses interventions sur la recherche. Et dans cette vision, ce CNRS, qui a pour mission première l’exercice de la recherche fondamentale et s’en félicite presque, ça fait désordre ! Bien que portant allègrement ses 69 printemps, cet organisme n’est donc plus jugé apte à l’autonomie intellectuelle, il faut l’aider à « bien penser ». Pour mettre en œuvre le plan stratégique « Horizon 2020 » du CNRS, le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche a mis en place en septembre dernier une commission « qui vise à clarifier l’organisation interne du CNRS et à renforcer les coopérations dans des domaines de recherche partagés avec les universités et les autres organismes de recherche nationaux. Cette commission sera notamment chargée de définir le périmètre et les missions de chacun des instituts disciplinaires dont la création est prévue par le plan ». Cette commission mixte d’une douzaine de membres entre le CNRS et la Direction Générale de la Recherche et de l’Innovation du ministère est nommée doit définir le périmètre de chacun des instituts et leurs missions : « La définition des contours de chaque institut tiendra compte de plusieurs critères : les synergies entre les disciplines, la construction d’un réel partenariat avec les universités et la fluidité des collaborations avec les autres organismes de recherche ». « Fluidité des collaborations avec les autres organismes de recherche » … Que de poésie technocratique pour évoquer la pose d’une future muselière ! Car quand même, on ne peut que s’étonner de la différence de traitement entre deux EPST, le CNRS et l’INSERM. Indépendamment de ce qu’on peut penser de cette réforme, force est de constater qu’après la nomination de son nouveau directeur, l’INSERM a mené de façon autonome – et c’est normal - la mise en place de ses instituts. Pour une réforme de même nature, le CNRS doit, lui, être assisté ... Non seulement cela est humiliant pour l’organisme et ses personnels, mais cette intrusion continuelle du politique dans l’organisation de la recherche scientifique devient proprement scandaleuse.
A côté de la commission mixte, deux groupes de réflexion, dont le travail alimentera celui de celle-ci, seront constitués. L’un sera dédié aux sciences du vivant (présidé par Jacqueline Godet) et l’autre aux sciences et technologies du logiciel (présidé par Guy Cousineau) pour « définir, dans ces deux domaines, les modalités d’une meilleure coordination des organismes de recherche nationaux et des universités. » [23]

Bien entendu, cette commission et ces groupes ont été constitués sans aucun a priori. Ils sont composés d’éminents scientifiques, personne ne le contestera, et c’est vraiment faire montre de mauvais esprit que de faire remarquer que cinq d’entre eux ont signé la pétition « pour un institut national des sciences du vivant » … Bien entendu encore, la commission et les groupes de réflexion auront eu tous les moyens pour travailler, et notamment tout le temps nécessaire : Annoncés par un communiqué du ministère le 22 septembre, la commission et les groupes de travail auront pu réfléchir jusqu’au …3 novembre où ils devront rendre leurs conclusions ! Finalement, et afin de montrer que le gouvernement tient vraiment à une réflexion de fond, c’est en fait le 10 Novembre que ces comités rendront leurs conclusions. Le temps de programmer la première réunion, c’est au moins … cinq semaines de travail qu’auront eues devant eux les membres de cette commission !
A ce sujet, il est intéressant de rapporter que la Grande-Bretagne s’est récemment livrée à un exercice qui n’est pas sans rappeler en partie ce à quoi la commission Pécresse et le groupe de réflexion SDV se livrent actuellement. En 2006, le chancelier de l’échiquier a chargé Sir David Cooksey d’établir un rapport sur la façon la plus optimale, au niveau organisationnel, d’utiliser le financement public en recherche sur la santé au royaume-uni [24]. Commandé en mars 2006, ce n’est pas deux mois plus tard que Sir Cooksey devait rendre son rapport … mais en décembre ! Et il n’est pas moins intéressant aussi de rappeler brièvement les conclusions (acceptées par le gouvernement) de ce rapport : ce n’est pas au MRC de phagocyter le NIHR ni le contraire, mais il s’agit de mieux coordonner leurs actions respectives : la création de l’OSCHR (Office for Strategic Coordination of Health Research) a été proposée et acceptée.

Neuf mois de travail d’un côté, deux de l’autre pour des comités ayant à réfléchir sur des réformes potentielles de grande ampleur. C’est toute la distance qui sépare le sérieux et le professionnalisme de l’improvisation et de l’amateurisme ou pire, … du cynisme politique !

6- Un ou plusieurs instituts en sciences du vivant ?

Il est nécessaire maintenant de revenir à l’essentiel du débat : quelle organisation pour la recherche en sciences de la vie ? En fait, le débat public sur cette question n’a jamais réellement eu lieu dans la communauté (à l’exception d’une table ronde « SDV » pendant l’université d’automne 2008 de SLR) et les positions se sont largement cristallisées jusqu’ici autour des deux pétitions dont j’ai fait état au chapitre 3. Un débat sain sur cette question nécessiterait d’évaluer s’il est « mieux » pour les sciences du vivant de conserver une pluralité d’acteurs (quand bien même ils se réorganiseraient en instituts spécialisés comme l’a fait l’INSERM), chacun d’eux ayant des objectifs d’étude et des missions différents ou si au contraire un institut unique du vivant fait du sens. Pour émettre un avis motivé sur cette question, il est essentiel de définir ce que l’on peut entendre par « mieux ». Ce point sera discuté dans le chapitre suivant, mais avant cela, il paraît utile sinon indispensable de poser un diagnostic clair et documenté sur les maux graves dont souffre la recherche en SDV, qui justifieraient l’empressement avec lequel on entoure son chevet et la programmation de réformes à la hussarde.

Sur ce point, et même si des réformes bien pensées pourraient être utiles - car tout est toujours perfectible -, autant le dire tout de suite, la recherche en SDV en France est d’un niveau dont personne n’a à rougir, compte-tenu du financement dont elle dispose. En ce qui concerne les publications en Biologie-santé, une étude intitulée « zoom sur l’excellence en recherche biomédicale en France » et publiée en 2004 dans la revue « médecine sciences » [25] conclut notamment : « Nos résultats montrent que la recherche biomédicale française contribue fortement aux avancées scientifiques mondiales et que sa qualité atteint les standards internationaux les plus élevés. » Les pétitionnaires pour un institut national des sciences du vivant (INSV) en conviennent d’ailleurs, le niveau des performances n’est pas le problème : « Contrairement à ce qui est souvent dit, la biologie en France est de haut niveau. Ses chercheurs ont une excellente réputation et les jeunes thésards français sont très prisés à l’étranger. » écrivent-ils. Il ne s’agit pas non plus (et c’est une différence notable avec les déclarations du gouvernement) de tourner le dos à la recherche fondamentale : « Nous affirmons que la recherche fondamentale a sa valeur propre et nous savons, de surcroît, qu’il n’y pas de recherche appliquée compétitive sans une recherche fondamentale exceptionnelle. L’important est d’assurer au sein de cet Institut une présence éminente de la recherche fondamentale. La vigilance sur ce point est essentielle. » écrivent-ils encore.

Quel est donc alors le problème ? Selon les tenants d’un INSV, tout serait en fait un problème de structures : « Nous considérons qu’un des handicaps majeurs de la recherche en biologie est la complexité du système, en particulier la multiplication des structures, qui conduit les chercheurs à consacrer un temps déraisonnable à la recherche de financements morcelés et à l’exercice de taches administratives lourdes dans un secteur où la réactivité est essentielle ». La ministre est également sur cette longueur d’onde et elle a caractérisé le problème au point d’en définir précisément les termes : il s’agit de « faire la chasse à l’émiettement » et c’est devenu dans ses propos depuis quelques mois, (quelle que soit la structure évoquée) une antienne qui confine à la manie sinon au T.O.C. [26] . Si l’on veut bien y réfléchir, il serait finalement assez étonnant, pour une ministre libérale, d’arriver à proposer des solutions d’organisation des SDV qui non seulement n’auraient aucun équivalent dans le monde (cf chapitre 2), mais qui tout compte fait, se rapprochent plus d’une conception digne de l’économie planifiée en faisant table rase de toutes les spécificités d’organismes. Mais sur quelles données, quelle expérience concrète les uns et les autres peuvent-ils s’appuyer pour penser qu’un organisme unifié pour la recherche en SDV va simplifier la recherche des financements, diminuer les tâches administratives et augmenter la réactivité ?

- En ce qui concerne les financements, nous ne pensons pas que l’argument soit vraiment recevable : l’arrivée de l’ANR dans le paysage a totalement modifié la donne et même si elle est critiquable par de très nombreux aspects (à commencer par l’absence d’un conseil scientifique et de très nombreux types de dysfonctionnements), son hégémonie représente de fait … une forme de simplification pour ce qui concerne les demandes de financement…. - En ce qui concerne la simplification adminitrative et de gestion, il y a fort à parier au contraire qu’un INSV ne ferait que compliquer les choses, au point même de risquer de les bloquer. Et ce pour une raison simple et évidente : un INSV ne pourrait se faire que par la fusion partielle ou totale des établissements existants (rappelés au chapitre 2). Or ceux-ci, à la fois par leur histoire et par leurs spécificités ont largement subi ce que les évolutionnistes appellent un processus de spéciation et on peut douter qu’une descendance soit possible en cas de croisement …. Plus sérieusement une fusion, quels qu’en soient les contours, conduirait nécessairement à un organisme de très grande taille (10 à 25 000 statutaires) dont on peut fortement douter que la réactivité soit la qualité première. Comment des organismes ayant développé chacun indépendamment pendant des dizaines d’années leur propre organisation administrative, mode de gestion et d’intervention, stratégie scientifique, bref leur culture d’organisme, pourraient-ils rapidement s’accorder pour développer ab initio une nouvelle culture, stratégie scientifique, procédures administratives, de gestion, d’évaluation uniques ? Quand on connait, pour ne prendre qu’un tout petit exemple, le degré d’incompatibilité des logiciels de gestion financière des laboratoires conçus par l’université et par le CNRS et donc les problèmes très concrets rencontrés au quotidien par les gestionnaires des UMR, on ne peut que conclure la chose suivante : quand bien même elle serait justifiée scientifiquement (ce que rien ne confirme), l’étude de faisabilité d’une telle opération nécessiterait d’une part près d’une année de travail approfondi et d’autre part la présence, dans les comités chargés d’en discuter, de spécialistes administratifs à côté des scientifiques, sans compter bien sûr une représentation des personnels. Il faut le dire très clairement : aucune de ces deux conditions n’est actuellement existante.

Enfin est surtout, comment imaginer qu’un tel bouleversement puisse survenir sans que la communauté elle-même ne se soit approprié ce débat ? Ce n’est absolument pas le cas et cette opération n’est pour le moment qu’un parachutage largué du plus haut niveau de l’Etat sans concertation aucune avec la communauté scientifique.

7- De quelles réformes aurait réellement besoin la recherche en sciences du vivant ?

Pour beaucoup de scientifiques (directions d’organismes comprises), pour les organisations syndicales, pour SLR, une « meilleure » organisation des sciences du vivant serait tout d’abord celle qui permettrait un meilleur exercice du métier de scientifique en sciences du vivant. Nous n’avons aucune honte à réaffirmer que pour nous le but premier (mais bien sûr non unique) de la recherche scientifique fondamentale est d’acquérir et d’organiser des connaissances nouvelles permettant de mieux comprendre la nature et les propriétés du monde qui nous entoure, dans toutes ses dimensions et ses composantes. Le corollaire de cette définition est qu’il n’est pas nécessaire, en recherche fondamentale, de penser au départ à une quelconque application des recherches. Bien sûr, en recherche finalisée ou en application de la recherche les choses sont différentes et nous prenons cela en compte. Mais nous réaffirmons la nécessité absolue de la coexistence de ces différents types de recherche, dans le respect de leurs différences en finalités, mode d’organisation et mode de financement. Soyons plus explicites encore : nous déplorons grandement le manque d’investissement en recherche de la part des firmes industrielles pharmaceutiques, d’instrumentation biologique et médicale, ou agroalimentaires de notre pays, voire même européennes. Mais ce n’est en aucun cas à la recherche fondamentale de pallier ces insuffisances et de se dérouter de ses champs d’investigation pour aller vers la recherche finalisée voire pré-compétitive. Ceci veut dire que nous sommes donc en désaccord profond avec la vision essentiellement utilitariste de la recherche que défend le gouvernement ou plus exactement nous affirmons qu’une recherche finalisée ou que des recherches appliquées ne peuvent se concevoir que si la recherche fondamentale - dont elle dépendra toujours - a les moyens d’exister et de se développer. Cette vision est partagée par une écrasante majorité de chercheurs. Or ce n’est pas, ce n’est plus ce qui se passe actuellement.

Ainsi par exemple, nous récusons totalement l’affirmation, proclamée dans le document sur la programmation 2009 de l’ANR selon laquelle « La recherche en Biologie-Santé doit avant tout répondre à une forte demande sociétale » (Les programmes du secteur Biologie – Santé de l’ANR, page 41). Et bien non ! ou plus exactement il est essentiel de dissocier, pour le financement de la recherche, l’aspect biologie de l’aspect santé : Que la recherche en santé humaine soit sensible (sans en être l’esclave) à la demande sociétale, pour autant qu’elle soit clairement exprimée, cela se conçoit. Mais la recherche en biologie fondamentale ne doit répondre à AUCUNE demande sociétale autre que celle de l’acquisition et l’approfondissement des connaissances. C’est donc pourquoi nous récusons la vision du Pr. A. Munnich, conseiller du président, d’une recherche biologique essentiellement asservie à des objectifs de santé publique (que devient la recherche en biologie végétale, agronomique et vétérinaire dans ce schéma ?). Or c’est cette précisément cette vision qui est - de fait - la seule justification des réformes en cours qui se font en l’absence totale de concertation.

Nous pensons que l’esprit qui doit prévaloir n’est pas celui de petits chiens qui, pour marquer leur territoire, leveraient la patte sur les réverbères de la connaissance et voudraient mutuellement se chasser de telle ou telle discipline. La biologie n’appartient à personne mais bien au contraire à tous. Une vision de la recherche en SDV réduite à celle d’un seul organisme de recherche, quel qu’il soit, serait forcément réductrice et nous aurions tous à y perdre. La biodiversité du vivant est à préserver, celle de ses chercheurs aussi, dans leur formation, leurs approches et leurs méthodologies. Nous militons donc pour le maintien et le développement d’une multiplicité d’acteurs en recherche sur le vivant, non pas par conservatisme, mais en étant convaincus que la biologie a profondément à y gagner.

Mais le double corollaire de cette intervention « multilatérale » est que tous ces acteurs soient d’une part dotés de moyens suffisants pour assurer leur mission. Ce n’est clairement pas le cas, en particulier pour la plupart des universités qui n’ont pas, actuellement, les moyens financiers d’assurer une recherche biologique de haut niveau. Il faut impérativement d’autre part qu’ils soient capables, à un haut niveau, de se parler et d’agir ensemble, beaucoup plus et beaucoup mieux qu’actuellement. Des actions communes pourraient commencer par des choses simples telles que la réalisation d’un portail Internet unique pour la mise en valeur de l’ensemble des recherches françaises en biologie que ce soit au niveau de la présentation des laboratoires, des disciplines, des axes de recherche ou des publications et bien sûr des collaborations. Mais ce ne serait qu’un premier pas. Il y a des programmes de recherche communs à élaborer et beaucoup d’autres idées à développer.

Au delà de la définition d’un « mieux » scientifique en recherche en sciences du vivant, c’est ausssi le « mieux » dans l’organisation générale, la gestion humaine et financière et donc finalement l’efficacité scientifique qui est à rechercher. Il s’agit donc, dans la mesure du possible, et en partant d’une logique de site, de favoriser par exemple tout ce qui ira dans le sens d’une meilleure collaboration entre acteurs institutionnels, avec la construction d’équipements scientifiques communs, la simplification administrative, la chasse aux « doublons » et la mutualisation consentie des services ou encore le lancement de programmes de recherche communs ou concertés. En ce qui concerne les personnels, toute réforme susceptible de proposer des métiers attractifs susceptibles d’attirer des jeunes vers des carrières scientifiques, correctement rémunérés, sur des statuts non précaires et tout en facilitant les passages choisis entre organismes différents est de nature à aller dans le sens du « mieux-disant ».

Nous espérons que le groupe de travail SDV de la commission Pécresse fera des propositions intéressantes concernant ces différents aspects.

8- Et maintenant ?

Le 10 novembre sera une date essentielle pour le futur du CNRS car c’est ce jour-là que devraient être remis à Valérie Pécresse deux rapports clés pour son avenir : le rapport sur la biologie, dont nous avons parlé dans le paragraphe précédent, mais aussi celui sur l’informatique, celle-ci étant menacée de délocalisation du CNRS vers l’INRIA (Institut National de la Recherche en Informatique et en Automatique). Mais c’est aussi dans les tous prochains jours que devrait être rendu public le rapport d’évaluation par l’AERES de l’INSERM en tant qu’organisme comme le rappelait récemment la ministre elle-même [27]. Or ce rapport, qui était attendu début octobre, traîne un peu ... Faisons un peu de mauvais esprit : ne s’agirait-il pas en fait de coordonner la sortie des deux rapports afin de veiller à ce que leurs conclusions convergent vers la proposition de création de l’Institut National des Sciences du Vivant ? C’est ce que laisse penser la phrase de la ministre évoquée précédemment. D’autre part et malheureusement, concernant le comité d’évaluation de l’INSERM, au sein duquel figurent plusieurs personnalités scientifiques de grand renom, il y a tout lieu d’émettre un certain scepticisme concernant son indépendance de réflexion et d’expression [28].
Le CNRS bientôt « dé-biologisé » et « dé-sinformatisé » malgré la validation par son CA d’instituts propres en son sein ?
On croit vraiment marcher sur la tête, mais il semble bien qu’une caractéristique commune des réformes en cours est la suivante : plus c’est gros, plus ça pourrait passer !
Dans ce qui va se jouer le 10 Novembre et dans les semaines qui suivront, plusieurs personnes ou groupes de personnes vont avoir un rôle essentiel à jouer sur l’avenir de la recherche française en biologie :

- En tout premier lieu, bien sûr, le groupe de réflexion « sciences du vivant » au sein de la commission de « mise en œuvre du plan stratégique Horizon 2020 du CNRS » aura un rôle déterminant. Si à l’issue de ses travaux, il préconise majoritairement une « dé-biologisation » - rapide ou progressive - de l’établissement, il ne fait pas de toute que la commission mixte CNRS-ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche (dont il dépend) suivra cette recommandation et la transmettra à la ministre. Si le comité est plus partagé, ou si, comme l’espère une large majorité de biologistes, il conclut à l’intérêt d’une pratique de la recherche biologique par tous les acteurs actuels et à l’urgence d’une meilleure collaboration entre eux, il sera beaucoup plus difficile à la ministre de « dé-biologiser » le CNRS.

- Ensuite encore, et bien évidemment, c’est à la ministre qu’il reviendra de mettre en œuvre (ou pas) les conclusions de ce rapport, quelles qu’elles soient. Avec l’acharnement qu’elle met depuis 18 mois maintenant à détruire l’établissement public de recherche français le plus connu internationalement - car ne soyons pas dupes, il ne se passe pas autre chose –, avec aussi la manipulation incroyable des chiffres du budget par son ministère (voir l’article « Budget 2009, toujours moins », nous ne pouvons malheureusement qu’être inquiets sur ses intentions. Notre ministre montre d’une part qu’il est finalement difficile de comprendre le milieu scientifique, son fonctionnement, ses méthodes et ses finalités si l’on n’est pas soit même passé(e) par ce milieu pendant sa formation initiale, ce qui est son cas. D’autre part, sa stratégie de lent contournement, ses attaques sur différents fronts de l’enseignement supérieur et de la recherche à la fois depuis bientôt deux ans démontrent que c’est à une professionnelle du safari que nous aurons eu affaire. Avant de partir en 2009 tenter sa chance pour les élections régionales en Ile de France, Valérie "chasseresse" aimerait infiniment mettre les trophées empaillés de la biologie et du CNRS sur sa cheminée. Tout cela avec un si charmant sourire …

- Enfin, et cela n’est pas le moins important, ce sera aussi à la communauté d’avoir son mot à dire sur ces réformes. Dans le futur, les géologues et les paléontologues se souviendront-ils de 2009 comme d’une année de la période du Pécressien inférieur (ère quaternaire) au cours de laquelle eût lieu l’extinction massive des biologistes du CNRS, tout comme celle des dinosaures eût lieu au début de l’ère tertiaire ?
C’est à vous tous, biologistes de ce pays, d’écrire maintenant la prochaine page de la recherche biologique française et de son mode d’organisation. Laisserez-vous une réforme capitale se réaliser sans vous, mais pire encore contre vous ?

Si c’est l’irréparable qui se commet à partir du 10 novembre 2008, …. Vous ne pourrez plus dire que vous ne saviez pas !

Bernard Jacq
DR2 CNRS
Bioinformaticien et Biologiste du Développement
Ancien membre du comité National (section 22)
Membre du conseil d’administration de SLR




Notes :

[1] Ainsi dans le budget de 1943 (document annexe 1, à voir ici) peut-on trouver trace de trois lignes de crédit pour la biométrie humaine, la physiologie de la nutrition et les animaux de laboratoires pour un total de 380 00 FF (…). Le Comité National de la recherche scientifique de 1948 (document annexe 2, à voir ici) comporte déjà une section de chimie biologique, quatre sections de biologie et une de sciences médicales auxquelles émargent les plus prestigieux biologistes de l’époque (parmi lesquels Emberger, Ephrussi, Fessard, Fromageot, Grassé, Lwoff, …).

[2] Ces chiffres sont extraits du rapport CNRS 2008 sur la biologie, rédigé par Frédéric Dardel, ex-directeur du département SDV du CNRS. Il peut être téléchargé à partir du blog de Sylvestre Huet (Libération)

[3] Une analyse fine des publications en SDV au CNRS et des éléments de comparaison avec l’INSERM peuvent être trouvés dans le rapport CNRS 2008 sur la biologie de Frédéric Dardel (cité ci-dessus).

[4] L’INRA est le deuxième institut français de recherche publique. Il rassemble plus de 8500 agents titulaires, parmi lesquels on dénombre 2430 ingénieurs et 4250 techniciens et administratifs. Il possède 218 unités de recherche (141 UMR).

[5] L’INSERM possède 316 laboratoires dont 80% sont implantés dans des sites hospitalo-universitaires, dans lesquels travaillent plus de 13 000 personnes (dont 7900 personnels INSERM).

[6] L’IRD est de création plus récente que les autres EPST (1994). C’ est une évolution de l’ancien ORSTOM (Office de la Recherche Scientifique et Technique Outre-Mer). Il est placé sous la double tutelle du ministère de la recherche et de celui de la coopération et compte 2200 agents titulaires.

[7] La Direction des sciences du vivant compte près de 1 900 personnes, dont plus de 1050 salariés du CEA et environ 390 chercheurs et techniciens venant des universités et des autres organismes de recherche. Elle accueille dans ses laboratoires quelque 450 collaborateurs temporaires (doctorants, post-doctorants...).

[8] Il le fait à travers un réseau de laboratoires nationaux parmi lesquels principalement les laboratoires : Argonne National Laboratory, Brookhaven National Laboratory, Lawrence Berkeley National Laboratory, Lawrence Livermore National Laboratory, Los Alamos National Laboratory et Oak Ridge National Laboratory ont joué un rôle essentiel en biologie structurale, en génomique et en bioinformatique notamment.

[9] Ainsi l’université d’Harvard possède une dotation propre de 25,9 milliards $ dont 560 millions de dollars d’intérêt ont été utilisés pour l’année 2005.

[10] Ce sont respectivement : le BBSRC (Biotechnology and Biological Sciences Research Council), le MRC (Medical Research Council), le NERC (Natural Environment Research Council) et le STFC (Science and Technology Facilities Council) pour une partie de l’instrumentation.

[11] Les huit instituts de l’INSERM : Circulation, métabolisme, nutrition ; Santé publique ;Neurosciences, neurologie, psychiatrie ; Cancer ; Génétique et développement ; Maladies infectieuses ; Technologies pour la santé ; Immunologie, hématologie, pneumologie ;

[12] Christian Devaux, Directeur d’unité mixte de recherche CNRS/Université de Montpellier ; Jacqueline Godet, Directrice scientifique de la Ligue Nationale contre le Cancer ; Bernard Pau, professeur à l’Université de Montpellier ; Jacques Samarut, Directeur de l’Ecole Normale Supérieure de Lyon ; Pierre Tambourin, Directeur Général de Génopole ; Michel Van der Rest, Directeur Général synchrotron Soleil.

[13] Dont le texte peut être lu sur le blog de Sylvestre Huet.

[14] Dont le texte peut également être lu sur le blog de Sylvestre Huet.

[15] voir ici

[16] voir ici

[17] Le Pr Arnold Munnich, de l’université Paris V René-Descartes, est directeur d’une unité Inserm à l’hôpital Necker-Enfants malades. Il n’y a que 3 personnalités qui occupent la fonction officielle de « Conseiller à la présidence de la République » : Arnold Munnich, Franck Louvrier (conseiller en communication et auprès des médias, un proche de N. Sarkozy) et Patrick Quart, (magistrat, conseiller pour la justice).

[18] Dans un entretien avec le philosophe Michel Onfray, publié par la revue « Philosophie magazine » avant l’élection présidentielle, le candidat donnait sa vision, très personnelle, du rôle de la génétique dans les comportements humains : "J’inclinerais, pour ma part, à penser qu’on naît pédophile..." et plus loin encore : « Il y a 1 200 ou 1 300 jeunes qui se suicident en France chaque année, ce n’est pas parce que leurs parents s’en sont mal occupés ! Mais parce que, génétiquement, ils avaient une fragilité, une douleur préalable. » déclarait-il notamment …

[19] voir ici. On peut notamment y lire une phrase qui résume toute la philosophie des réformes qui seront mises en œuvre plusieurs mois plus tard : « Seul standard reconnu à l’étranger, l’université doit devenir le barycentre de la recherche et de l’enseignement d’un campus car l’enseignement n’est supérieur que s’il est adossé à la recherche ».

[20] Dans un entretien du 26 juin 2007 avec Jean-Yves Nau, journaliste au monde, il déclare : "L’heure est grave, très grave. Si rien n’est fait, la recherche biomédicale française sera bientôt sur le banc de touche. Ces dernières années, le bilan des publications scientifiques émanant du monde hospitalo-universitaire français est plus que maigre. Il nous faut redistribuer les cartes, donner l’autonomie aux universités et totalement repenser le rôle des organismes de recherche qui, à l’image des National Institutes of Health aux Etats-Unis, doivent devenir des agences de moyens."

[21] voir ici. On peut notamment lire dans son discours : « Pour la médecine, ce replacement des universités au centre du systême se décline en UFR médicales qui seront les opérateurs de la recherche biomédicale ». Et plus loin : « Les UFR, "c’est là que seront rattachés les chercheurs, c’est là qu’émergeront les projets, c’est là que seront attribués les crédits et les postes d’enseignants-chercheurs". ». Au cas où son propos aurait pu inquiéter, A. Munnich se veut alors rassurant un peu plus avant dans son propos : « … Mais "on ne va pas y aller brutalement, il n’est pas question de faire basculer tous les chercheurs du CNRS vers les universités. Cela se fera à long terme" avec les nouveaux recrutements qui se feront majoritairement vers les universités, en donnant plus de moyens à celles-ci pour rendre plus attractives les carrières des enseignants-chercheurs ». Alors … rassurés ?

[22] A consulter ici

[23] voir l’annonce et la composition de la commission et des groupes de réflexion ici

[24] voir ici pour une version pdf du rapport et pour une analyse de ce rapport

[25] « zoom sur l’excellence en recherche biomédicale en France », par Lesya Baudoin, Céline Peltier, Claude Graillot-Gak, Nicole Haeffner-Cavaillon, Médecine Sciences 2004, 20, 1149-1155, pdf ici

[26] Tout part en miettes pour Valérie Pécresse : les EPST, les laboratoires, les universités, les logements, … Quelques exemples parmi des dizaines ….

- 3 Décembre 2007, Interview sur Radio-campus : « Il s’agit pour elle d’une « stratégie universitaire qui consiste à éviter l’émiettement des logements étudiants. »
- 2 Février 2008, discours : « Face à l’émiettement des structures, la ministre a rappelé la volonté du Gouvernement de faire de l’institut le véritable pivot de la recherche biomédicale française, … »
- 2 Février 2008, article dans le journal de l’innovation : « Regrettant « l’émiettement et la complexité » de l’Inserm, la ministre s’est prononcée …. ».
- 5 Février 2008, discours : « La plus grande faiblesse (de l’Inserm) c’est sans doute l’émiettement et la complexité de ses structures", estime la ministre, … »
- 6 juin 2008, Interview Le figaro « Les universités françaises - au nombre de 85 - sont émiettées et en souffrent. »
- 26 Juin 2008, Interview la nouvelle république : « Pour cela, il faut donner plus de force plus de cohéence aux disciplines et éviter que le CNRS ne soit qu’un émiettement de laboratoires … »
- 16 Septembre 2008, Interview dans Capital : « Cela va donner de la cohérence à cet organisme pénalisé par un émiettement de ses laboratoires, qui travaillent souvent sans que l’on sache ce qu’ils font. »

[27] Lors de la séance du 3 novembre à l’assemblée nationale (voir ici), la ministre précisait : « … J’ajoute que l’évaluation de l’INSERM par l’Agence d’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur nous sera rendue dans les semaines qui viennent, et qu’elle permettra de valider la stratégie de réforme de l’INSERM et, plus largement, la stratégie française en sciences du vivant. »

[28] Au milieu de ses travaux, le comité d’évaluation de l’INSERM a été transporté en bus à l’élysée (information confirmée de source sûre) où il a directement été briefé par le président et son conseiller à la biologie et à la santé, A. Munnich. Dans de telles conditions, que penser de l’indépendance d’esprit avec lequel les conclusions seront émises ? La lecture des recommandations du comité sera très illustrative à cet égard.