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Démission des élus étudiants de l’EHESS

Des doctorants refusent de faire de la figuration.

Par babeuf, le 1er décembre 2008

Nos problèmes de jeunes chercheurs à l’EHESS nous semblent emblématiques du manque de démocratie dans l’organisation de la recherche : nous démissionnons face au mépris de chercheurs en place qui occultent trop souvent les problèmes anciens et nouveaux de la relation doctorant/directeur/labo.

Depuis plusieurs années nous sommes représentant-e-s des étudiant-e-s à l’EHESS au Conseil Scientifique, au Conseil d’Administration et au Conseil de l’École Doctorale. Nous consacrons une partie de notre temps et de notre énergie à essayer de faire valoir les droits et les intérêts des étudiant-e-s (en master et en thèse) dans cette institution. Surtout nous tentons de faire respecter la possibilité d’une autre parole que celle des directeur-ice-s de recherche et de faire admettre que l’avenir de l’EHESS n’est pas dans les batailles internes entre laboratoires mais dans le développement des meilleures conditions de recherche possibles pour les étudiants. Lors de la dernière réunion de l’École Doctorale (juin 2008), qui devait aborder la modification de la charte des thèses, lorsque la question essentielle de l’encadrement des doctorant-e-s a été abordée, il ne restait plus que 4 responsables de formation au moment de la discussion (sur une quinzaine d’élus)... Les étudiant-e-s apprécieront donc le peu de cas que l’on fait de leurs préoccupations et de leur(s) condition(s) de travail (et de vie) dans les instances de l’EHESS. Cette réunion fut l’exemple paroxystique des obstacles qui nous sont opposés systématiquement depuis des années dès que nous essayons d’apporter une autre vision de ce que doit être l’EHESS. Sur des questions aussi déterminantes que la limitation du nombre de doctorant-e-s par directeur-ice, le soutien financier à la reproduction des thèses, l’intégration des doctorant-e-s dans les laboratoires, la médiation en cas de conflits entre doctorant-e et directeur-ice, nous avons été face à une opposition systématique pour faire avancer les choses. Bien que « scientifiques », nos directeur-ice-s ne prennent même pas le soin de motiver leurs réponses par des arguments autres que « ce n’est pas faisable », « nous refusons ». On traite ainsi les représentant-e-s étudiant-e-s, et donc à travers eux l’ensemble des étudiants, avec trop de mépris, cherchant sans cesse à décrédibiliser leur parole. La violence symbolique, le rappel de la hiérarchie et les attaques personnelles sont les réponses qui nous sont le plus souvent infligées pour éviter les débats de fond et les véritables problèmes posés par l’absence de moyens et de suivi des étudiant-e-s. On nous répond trop souvent que les contraintes institutionnelles sont des obstacles insurmontables pour nos revendications mais à chaque réunion nous pouvons constater que ces mêmes contraintes institutionnelles sont facilement détournées et que les enseignant-e-s et l’administration s’en arrangent très bien quand ils le veulent. Si l’EHESS veut tout simplement être une école où les étudiant-e-s peuvent réaliser leur recherche dans des conditions intellectuelles et matérielles décentes, elle doit changer radicalement son mode de fonctionnement et arrêter de perpétuer une relation paternaliste, mandarinale et suffisante avec les étudiant-e-s. Le rôle de représentant-e-s, qu’ils soient enseignant-e-s ou étudiant-e-s, est de porter des revendications et des exigences qui dépassent leur propre personne et c’est à cette seule condition que les discussions peuvent être riches et bénéfiques pour tous. Une défiance permanente se manifeste à l’égard des étudiants : l’organisation d’une simple assemblée générale au moment du mouvement LRU, fait on ne peut plus banal et ordinaire dans une structure universitaire, est perçue comme une menace, une agression... L’occupation du 105 lors du mouvement anti-CPE a mis en avant l’immense décalage entre notre institution et la réalité sociale qu’elle prétend penser. Le débat sur le déménagement, opposant « nouvelle » et « vieille garde », se mène sans demander leur avis aux principaux concernés : les étudiant-e-s. Nous avons utilisé les différentes modalités d’expression et de discussion, de l’opposition frontale à la discussion cordiale, sans résultat. Au cours de ces années nous avons mené plusieurs campagnes de consultation et de réflexion collective auprès des étudiant-e-s aussi bien sur la question du déménagement, des conditions matérielles de travail (la salle de travail est toujours une utopie !), de l’encadrement des doctorant-e-s. Le résultat de ces enquêtes est à la base de nos revendications et de nos interventions dans les conseils, et celles-ci ne sont pourtant que très rarement prises en compte. La direction n’a aucune connaissance des étudiant-e-s mais elle se permet trop souvent de les ignorer quand ils prennent la parole. Depuis un an et demi on nous explique que les étudiant-e-s vont être au cœur de la future EHESS, ce qui n’est motivé que par le fait que les critères de réussite et d’insertion professionnelle vont être désormais un mode d’évaluation ministériel. Mais ce discours n’est qu’une rhétorique vide et n’a pas entraîné un changement de comportement vis à vis de ceux chargés de représenter les étudiant-e-s. Ainsi, lors de cette même réunion de l’Ecole Doctorale, la discussion autour de l’enquête sur le devenir des doctorant-e-s de l’EHESS ne s’est cantonnée qu’à un concours de la meilleure idée pour « bidouiller » les chiffres (chômage et précarité des doctorant-e-s, durée des thèses...) et ainsi montrer patte blanche au ministère. Et ce malgré nos efforts pour faire porter le débat sur les difficultés de réalisation de thèse et d’insertion professionnelle que cette enquête démontrait. Face à ce constat d’échec global, nous préférons démissionner plutôt que de continuer à être de simples signatures sur un procès verbal – qui ne tient pas compte de nos paroles. Cet échec est finalement plus celui de l’EHESS que celui de quelques étudiants qui ont eu la mauvaise idée de vouloir penser l’intérêt commun.

Les 5 élus étudiants au conseil doctoral de l’EHESS