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V. Pécresse, le 3 -06-09 : pour financer le dédoublement des filières, "Je me place dans une logique d’heures supplémentaires, d’optimisation des moyens, de mobilisation des ressources plutôt que dans une logique de création d’emplois."

le 7 juin 2009

Dans Métro, le 2 juin 2009, V. Pécresse a répondu à la question « Comment allez-vous financer le dédoublement des filières ? » : « C’est une question de réorganisation au niveau des universités. Organiser la souplesse et les parcours sur mesure est impossible au niveau de l’Etat. De plus, au niveau local, on dispose d’un vrai vivier de compétences pour le faire. Je me place dans une logique d’heures supplémentaires, d’optimisation des moyens, de mobilisation des ressources plutôt que dans une logique de création d’emplois. En matière de taux d’encadrement des étudiants, on est dans la moyenne européenne. »

Tout l’entretien : http://www.metrofrance.com/infos/va...

Philippe : Je souhaite que ma fille aînée, qui entre en seconde, aille à la fac. Mais ma femme n’a plus confiance en l’université et souhaite l’envoyer dans une grande école.

La France compte 83 universités et 225 écoles. Notre but, à la fin de l’année, est d’avoir quinze grands pôles de recherche de l’enseignement supérieur pour casser les frontières entre écoles et universités. J’ai aussi proposé qu’on puisse faire des classes préparatoires aux grandes écoles dans les universités dès la rentrée prochaine. L’idée est d’avoir un premier cycle universitaire qui donne un diplôme de licence et qui permette de préparer les concours. J’aimerais aussi développer les master conjoints grandes écoles-universités. L’université a besoin de redevenir le cœur du système. Cela implique qu’elle ait une gouvernance à la hauteur – la loi sur l’autonomie lui en donne les moyens –, qu’elle ne destine pas tous ses diplômés au monde de l’enseignement et qu’elle s’ouvre sur le monde professionnel. Donc, quand votre fille sera en terminale, la situation aura, j’espère, beaucoup évolué ! Je suis très optimiste.

Anne : J’ai un fils qui est à la fois littéraire et scientifique. Mais le système français l’oblige à choisir très tôt sa spécialité. C’est vraiment dommageable…

C’est vrai, on hyperspécialise dès la première année. Changer cela est l’un des enjeux de la réforme et l’un des objectifs du plan Réussir en licence, auquel j’ai attribué 730 millions d’euros sur les trois prochaines années. Les jeunes bacheliers qui arrivent en filière générale à la fac ont quinze ou vingt heures de cours hyper¬spécialisés dès la première année. J’ai donc proposé de créer une première année fondamentale, pluridisciplinaire et avec des enseignements d’ouverture. Cette année s’effectuerait en contrôle continu et, à la fin du premier semestre, un rendez-vous d’orientation obligatoire serait fixé. Le but est d’éviter que 50% des jeunes échouent à l’université dès la première année. De plus, on essaie de proposer des cursus communs. A Jussieu, par exemple, on peut faire maths et sciences politiques à la fois. L’idée est de mettre en place une spécialisation progressive, avec une ouverture sur des métiers via des stages. Une bonne idée serait, après bac +3, de faire une année de césure pour travailler, puis de revenir faire son master après. Sinon, quand on postule à bac +5 sans expérience professionnelle, les entreprises ne proposent que des stages.

Linda : Comment allez-vous financer le dédoublement des filières ?

C’est une question de réorganisation au niveau des universités. Organiser la souplesse et les parcours sur mesure est impossible au niveau de l’Etat. De plus, au niveau local, on dispose d’un vrai vivier de compétences pour le faire. Je me place dans une logique d’heures supplémentaires, d’optimisation des moyens, de mobilisation des ressources plutôt que dans une logique de création d’emplois. En matière de taux d’encadrement des étudiants, on est dans la moyenne européenne.

Serge : Quelles sont vos autres propositions pour lutter contre l’échec en fac ? En plus du dédoublement des heures de cours, il faut un professeur référent par élève, qui le guide et organise son rendez-vous d’orientation à la fin du premier semestre de la première année. Il faut aussi rendre obligatoire le tutorat et le développer. Les tuteurs seraient des élèves de master 2 ou des doctorants, pas forcément des enseignants. Je souhaite aussi qu’on utilise davantage le soutien numérique, qu’on puisse podcaster les cours et qu’on dispose de bibliothèques en ligne.

Linda : N’est-ce pas le moment de faire une sélection à l’entrée de l’université ? Le véritable enjeu, c’est réussir en terminale le défi de l’orientation. Il existe une vraie demande dans les filières sélectives courtes (BTS, IUT, DUT), mais l’offre ne suit pas. Il faut créer davantage de places dans ces filières, et orienter les demandes vers les métiers de demain : ceux en lien avec l’énergie, les industries de santé et du vieillissement, la gestion des ressources humaines.

Anne : Pourquoi le conflit au sein des universités a-t-il duré si longtemps ? Y a-t-il eu un problème de méthode ou de communication de votre part ? Nous avons pleinement joué la carte du dialogue et de la concertation avec les organisations représenta¬tives. Mais il est très difficile de convaincre 57 000 enseignants chercheurs que nos intentions sont pures, surtout quand tant de fausses informations circulent sur les blogs.

Séverine : Quel est le suivi des réformes en cours ?

On connaît la situation fac par fac. Vingt universités sont déjà autonomes, et, à l’image de celle de La Rochelle, elles ont retrouvé un beau dynamisme. On signe avec elles des contrats et, tous les quatre ans, on évalue ce qu’elles ont fait en recherche et en formation. Après, on signe un nouveau contrat sur la base de leurs projets. En somme, jamais l’Etat n’a été aussi présent aux côtés des universités ! C’est une bonne chose dans un contexte de concurrence très forte de la part des écoles et des universités étrangères.

Linda : Vous parlez d’instaurer des passerelles entre les universités et les entreprises. Mais que faites-vous des chercheurs en sciences humaines qui ne sont pas tous intégrables au monde de l’entreprise ? Et que faites- vous pour ceux qui préfèrent poursuivre la recherche ?

Je vais créer un haut conseil aux sciences sociales et aux humanités pour évoquer ces sujets, et mettre un terme à l’incompréhension et à la méfiance. De plus, j’ai créé une filière sciences humaines au sein de l’Agence nationale de la recherche, pour que soient financés des projets. Je travaille aussi avec le CNRS afin de structurer un institut national en sciences humaines et sociales, et de lui donner plus de moyens. L’idée est qu’il faut mettre des sciences humaines partout et ne pas les bunkeriser.

Séverine : Que faites-vous pour améliorer la mobilité internationale des enseignants-chercheurs ?

Dans le nouveau statut, on considère que tous les enseignants étrangers qui viennent en France occuper un poste équivalant à celui de leur pays sont en “mobilité”, c’est-à-dire qu’ils n’ont pas à repasser toutes les procédures de qualification qui prennent six mois et qui étaient un frein au recrutement d’étrangers. La réciproque est vraie pour les Français qui veulent enseigner à l’étranger.

Séverine : Le localisme qui joue au niveau national ne va-t-il pas être décuplé au niveau international ?

Avec l’autonomie, les universités vont de moins en moins privilégier les “locaux”, car elles auront intérêt à prendre les meilleurs. Le phénomène du localisme vient du fait qu’on ne s’est jamais intéressé aux vraies performances des universités. Ce n’est plus le cas.

Metro : Selon vous, le mouvement universitaire va-t-il peser sur l’image de la France au niveau international ?

Oui, mais nous allons tout faire pour défendre l’image de l’université française. Dans près de la moitié des universités, il n’y a eu aucune perturbation. J’ai toujours pensé que le blocage, particularité bien française, n’est pas la bonne réponse. C’est prendre en otages les étudiants les plus fragiles, c’est entraver la transmission des savoirs, c’est donner une mauvaise image à l’étranger. Une manifestation a un impact tout aussi fort ! Concernant la grève, si les enseignants- chercheurs veulent la faire, ils le peuvent. Mais normalement, quand on fait grève, on n’est pas payé… Bien sûr, ils peuvent rattraper les cours le samedi matin. Mais c’est au détriment des étudiants qui sont obligés de travailler pour financer leurs études… Si j’avais pu éviter cette situation, je l’aurais fait. Mais on ne pouvait pas passer à côté de la réforme.