L’assassin revient toujours sur les lieux du crime
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, le 10 février 2011
L’un des premiers actes majeurs de Nicolas Sarkozy pour détruire les organismes de recherche fut l’envoi, en 2008, d’un comité de l’AERES pour « évaluer l’INSERM ». Les résultats de cette évaluation, qui ne fut en rien scientifique, ont tellement correspondu aux attentes de Sarkozy que celui-ci invita, chose totalement inédite, tout le comité à dîner à l’Elysée. Nous ne reviendrons pas ici sur ce rapport (1) qui, sous couvert d’évaluation scientifique, proposait ni plus ni moins de dissoudre l’Inserm, les Sciences de la vie du Cnrs, l’Inra et d’autres dans « un seul institut national pour le financement de la recherche en sciences de la vie et de la santé ».
L’honorable Président de ce comité « indépendant » était Elias Zerhouni du National Institute of Health (USA).
Acte deux : dans la foulée du rapport, l’Alliance nationale pour les sciences de la vie et de la santé (Avisan) fut créée, coiffant les organismes déjà cités. C’est une structure parfaitement pilotable par le gouvernement, puisque sans aucun élu.
Le troisième acte fut la mise de l’Avisan dans la remorque de Sanofi-Aventis et autres grandes entreprises. En effet, le jour même où A. Syrota, futur « patron » de l’Alliance nationale pour les sciences de la vie, écrivait « demain 20 à 30 % de la recherche privée se fera avec le public » (La Tribune, 16/11/09), le Monde (16/11/09) titrait « Sanofi-Aventis parachève le nettoyage de son portefeuille de recherche » avec fermeture de plusieurs centres et plus de mille licenciements de chercheurs. Faut-il un dessin ?
Le quatrième acte est l’affaire récente du Médiator. Elle a mis en évidence les conflits d’intérêts et, en particulier, le fait que les experts du ministère provenaient de laboratoires largement arrosés par des contrats de Sanofi ou de Servier (dont le coût est, en gros, remboursé par le CIR, le Crédit d’Impôt Recherche). Et pour que nul ne puisse échapper à leur influence, les laboratoires publics ont vu leur dotation budgétaire en baisse, pour diminuer plus encore leur liberté d’initiative scientifique.
Le cinquième acte est la nomination de Elias Zerhouni comme “Président Monde, Recherche, Développement” chez Sanofi-Aventis. Comme le dit Pierre Chambon dans “La Recherche” (février 2011) : c’est “une excellente nouvelle pour la France, car Elias possède le poids nécessaire pour participer à la réorganisation de la recherche biomédicale française et influencer les décisions”.
C’est parler d’or.
(1) Pour une analyse de ce rapport et pour la réaction des instances scientifiques du CNRS voir La Vie de la Recherche scientifique N° 375, page 8 :http://www.sncs.fr/article.php3?id_...