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Evolution du personnel permanent CNRS de 1992 à 2010

Par JB., le 19 avril 2012

A quelques jours de l’élection Présidentielle, il m’a semblé intéressant de réactualiser un article de mars 2009, décrivant l’évolution des effectifs du personnel permanent du CNRS (Centre National de la Recherche Scientifique) entre 1994 et 2007. Aujourd’hui - 3 ans après la publication de cet article - les chiffres de 2008, 2009, 2010 sont accessibles (via les "bilans sociaux" du CNRS).

Cette étude a un cadre certes très limité [1], mais elle permet - grâce à la fiabilité des données sur une longue période [2] - d’avoir une vision objective de l’évolution :

  • des effectifs du personnel permanent du CNRS sur la période 1992 -2010 [3], en nombre et en classe d’âges (pour les populations "Chercheurs" et "Ingénieurs, Techniciens, Administratifs" (ITA) ).
  • du "poids" de ces agents dans la population résidant en France (voir la définition sur le site de l’INSEE).

De plus, l’organisme public qui est analysé dans cette étude étant le plus grand organisme de recherche fondamentale pluridisciplinaire Européen et ayant grandement contribué à la découverte de nombreuses connaissances scientifiques (voir par exemple, l’article d’Albert Fert, prix Nobel de Physique 2007), il est logique de s’y intéresser avec attention.


Pour information, les bilans sociaux du CNRS (de 1999 à 2010) sont disponibles sur le site du CNRS à cette adresse et certaines données pluriannuelles concernant le personnel


Evolution relative de la population "permanente" du CNRS entre 1992 et 2010 :

Le graphique ci-dessous, décrivant l’évolution relative (base 100 en 1992) des populations fonctionnaires "Ingénieurs, techniciens, administratifs" (ITA) et "Chercheurs" du CNRS, montre qu’entre 1992 et 2010, la population ITA et "chercheurs" ont relativement peu changé : -2,2 % pour les ITA et +2,3% pour les chercheurs (soit -0,2% pour l’ensemble des agents permanents). On peut observer que cette "quasi-stagnation" des effectifs (sur presque une décennie) est le résultat de dynamiques antagonistes qui finissent par s’équilibrer. En effet, on peut constater que les gouvernements à majorité de droite (RPR, UMP) sont toujours responsables d’une baisse des effectifs, et que les gouvernements à majorité socialiste (PS) sont toujours responsables d’une hausse des effectifs. Ainsi, c’est l’alternance - au pouvoir - de ces partis politiques qui amène (sur la période étudiée) à une stagnation des effectifs du personnel permanent du CNRS.


Poids de la population "permanente" du CNRS au sein de la population résidant en France, entre 1992 et 2010 :

On ne peut cependant pas se contenter d’une telle analyse. En effet, tout comme la monnaie connaît - au cours des années - une "érosion monétaire", les effectifs des organismes de recherche (ainsi que ceux de toute autre structure publique) doivent - si l’on souhaite identifier le "soutien effectif" du gouvernement à la structure étudiée - être comparés à ceux de la population de leur pays [4]. Un tel exercice permet de mieux identifier l’évolution du "poids" du personnel permanent d’une structure (dans le cadre de l’analyse du budget, celui-ci est souvent rapporté au PIB de la France (voir par exemple)). Une comparaison de ce type permet d’avoir - au premier ordre - une idée du "soutien" que les gouvernants apportent à la structure étudiée.

Le graphique ci-dessous, décrivant l’évolution relative des populations "ITA" et "Chercheurs" permanents du CNRS au sein de la population résidant en France (base 100 en 1992), montre que le CNRS voit - en 18 ans (une génération) - son poids dans la population française baisser de 10%. Les 8 années comprises entre 2002 et 2010 (gouvernement RPR, puis UMP) représentent - à elles seules - 70% de cette baisse (car en 2002, le niveau relatif était à 97%, alors qu’en 2010, il est à 90%). A un tel rythme, on peut facilement imaginer que le poids du CNRS dans la production française de connaissances diminue [5].


Pyramide des âges entre 1992 et 2010 : impact de la loi sur les retraites et évolution de l’âge moyen d’entrée au CNRS pour les "jeunes chercheurs" :

L’étude de la "pyramides des âges" des agents permanents du CNRS permet de constater certaines évolutions sur l’âge moyen d’entrée et de sortie au CNRS. L’animation disponible en cliquant ici présente l’évolution des effectifs permanents par "classes d’âges" pour les populations ITA et chercheurs du CNRS entre 1992 et 2010. Cette animation, comme les figures ci-dessous, montrent comment la "bosse" des quinquagénaires de 1996 (issus du "baby-boom") a été progressivement remplacée - en 2010 - par une "bosse" de quadragénaires (d’amplitude plus faible). Ce "déplacement" est majoritairement du à un re-pyramidage des effectifs ITA (courbes vertes).

Ces figures renseignent aussi sur

  • la période de départ à la retraite. En effet, les courbes ITA et chercheurs de 2010 présentent - comparativement à celles de 1996 - une population beaucoup plus importante entre 60 et 65 ans. En 1996, il y avait 921 ITA situés dans la classe d’âge 60-65 ans, et 864 chercheurs. En 2010, ils sont respectivement 1275 (+38%) et 1543 (+79%).
  • l’âge de recrutement des "jeunes" chercheurs. En effet, lorsque l’effectif des chercheurs commence à être - pour la classe d’âge considéré - significatif, la courbe des effectifs total (en rouge) commence à s’écarter de la courbe des effectifs ITA (en vert) [6] . En 1996, on constate un net décrochage (entre les courbes rouge et verte) vers 28 ans, alors qu’en 2010, ce décrochage arrive vers 30 ans.

Conclusion :

Cet article - en s’appuyant sur des données objectives - permet d’illustrer - sur une génération - l’effet de politiques antagonistes concernant les effectifs permanents du plus grand des Etablissement Public à caractère Scientifique et Technique (EPST). Cette analyse dont le périmètre est très limitée [7] permet tout de même d’identifier très nettement le rôle des gouvernements successifs. Cette analyse mène aux même conclusions que celles publiées - sur la part du budget de la Recherche dans le PIB - dans "Nature" en 2007.


[1] Seul le personnel "permanent" du CNRS est étudié, soit environ 26 000 personnes.

[2] C’est un avantage indéniable du CNRS au regard d’autres structures de recherche ou d’enseignement supérieur.

[3] Avant 1992, il ne m’a pas été possible d’extraire des "bilans sociaux", le nombre exact d’agents du CNRS. En effet, à cet époque, les 2 instituts nationaux : l’INSU et l’IN2P3 avaient - dans les bilans sociaux - des traitements séparés. C’est pour cette raison que l’analyse débute en 1992. Si quelqu’un avait la bonne idée de réaliser ce travail pour 1991 et les années précédents, je serai naturellement ravi de pouvoir inclure (après vérification) ces données.

[4] Dans la domaine de la recherche, l’être humain ne pourra jamais être remplacé par des machines (même si l’informatique aide grandement certains domaines de recherche). En conséquence de quoi, le nombre d’agents permanents au sein de la structure est un facteur déterminant dans l’évaluation de celle-ci.

[5] Cette affirmation repose sur l’hypothèse que les autres acteurs de la recherche en France (notamment les universités et les autres organismes) subissent une croissance relative de leur population plus élevé qu’au CNRS, et que le personnel "non permanent" du CNRS a - sur cette même période - suivi la même évolution que le personnel permanent. Or on sait, que ce n’est pas le cas voir ici et ici .

[6] Les emplois ITA nécessitant - en moyenne - un niveau d’étude moins élevé que celui des chercheurs, correspondent à une entrée dans la vie professionnelle plus précoce.

[7] Par exemple, l’évolution du personnel non permanent au CNRS permettrait de compléter ce tableau. De même pour les effectifs des universités ou autres organismes publics de recherche. Concernant l’aspect budgétaire, il a été grandement analysé sur ce site.