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Oser protéger les futurs doctorants

Mieux vaut prévenir que guérir

Par Laurent Souche, le 12 mars 2004

Malgré l’importance du mouvement de contestation actuel, il serait illusoire de croire que le nombre de postes statutaires de chercheurs va croître de manière importante dans les années à venir. La situation actuelle, beaucoup de thésards, d’ATER et de post-docs et peu de postes permanents, crée un engorgement qui laisse bien trop de jeunes docteurs sur le carreau. Il est temps que les chefs d’équipes prennent leurs responsabilités en refusant de recruter des doctorants dont ils savent que la thèse ne débouchera - professionnellement parlant - sur rien.

Détresse des jeunes docteurs

La situation de crise actuelle résulte d’une tendance a la précarisation de la recherche qui dure depuis plusieurs années. Cette précarisation est avant-tout subie par les jeunes chercheurs qui, a l’issue de leur thèse, poste d’ATER ou post-doc ne parviennent pas à intégrer la recherche publique et sont trop souvent contraints de changer complètement de filière, perdant ainsi le bénéfice du savoir-faire et de la formation acquis au cours de leurs premières années d’activité professionnelle. Paradoxalement, tandis qu’il est extrêmement difficile d’obtenir un poste statutaire, il reste relativement aisé pour un étudiant d’entrer en thèse. Dans de nombreuses disciplines, la disproportion entre nombre de thésards et nombre de postes statutaires en est la preuve flagrante. C’est d’ailleurs un des premiers problèmes abordés par les écoles doctorales : la majorité des doctorants finira dans le secteur privé, et rarement pour y faire de la recherche.

Pour les jeunes docteurs, il en résulte un goulet d’étranglement après la fin de la thèse et, pour nombre d’entre eux, la sensation de s’être fourvoyés quand ils ont décidé, quelques années plus tôt, d’embrasser cette carrière.

Hypocrisie des directeurs d’équipe

Du point de vue des directeurs de labos et des responsables d’équipe, cette situation se comprend très bien : n’ayant pas les moyens d’embaucher des chercheurs statutaires, ils continuent à développer leurs thématiques de recherches en s’appuyant sur cette main d’œuvre, la seule qu’ils puissent espérer recruter. D’ailleurs, il n’est pas idiot de considérer les doctorants sont majeurs, vaccinés et conscients que débuter une thèse comporte certains risques professionnels. Cependant, cette attitude n’est pas dénuée d’hypocrisie. Certains directeurs de thèse savent pertinemment que pour les doctorants sous leur responsabilité, les chances d’intégrer un jour la recherche publique sont quasi-nulles. Selon le domaine de recherche, ils savent aussi que les débouchés industriels sont inexistants. Seulement voila : leur labo doit continuer à vivre, ils ne peuvent se passer de personnel.

Sauver la recherche sans sacrifier ses jeunes

S’il est impossible de convaincre le gouvernement de créer les postes assurant un avenir professionnel aux jeunes docteurs, alors il faut que les directeurs de labo et les membres de commissions de spécialistes prennent leur responsabilité et refusent de contribuer, même contre leur gré, comme ils le font à l’heure actuelle, à la précarisation qui touche de plus en plus de jeunes chercheurs. Cela peut sembler paradoxal à certains, mais il me semble qu’aujourd’hui, l’attitude responsable consiste à refuser de pourvoir une bourse de thèse ou de post-doc si celle-ci ne débouche sur rien, à ne pas recruter systématiquement plus d’ATER que de Maîtres de Conférences. Bref, tout cela se résume fort simplement : mieux vaut prévenir que guérir.

Je crois et j’espère proposer ici une action concrète qui peut être entreprise par les chercheurs eux-mêmes et qui est susceptible de déboucher sur des mesures favorables à la recherche Française.