Conférence de presse du comité SLR Besançon - Franche-Comté (4)
Par
, le 19 mars 2004Une trentaine de personnels de l’université de Franche-Comté et de doctorants ou post-doctorants étaient représentés par Gilles Bossuet (ITA), François Vernotte (directeur démissionnaire), Guy Moreels (vice-président section 34 du CNU), Philippe Huetz (post-doctorant) et Laetitia Peifer (vice-présidente association des doctorants de Franche-Comté).
Les médias représentées étaient l’Est Républicain et Les dépêches-Le Progrès, pour la presse écrite, France Bleue Franche-Comté et Radio Bip, pour la radio, et France 3 Franche-Comté pour la télévision.
Témoignage de Philippe Huetz :
Si je m’exprime aujourd’hui, c’est pour vous donner mon témoignage mais aussi au nom de nombreux de mes collègues qui, partis en postdoc à l’étranger, n’ont pas réussi à revenir en France, ou après plusieurs années, sur des emplois qui ne leur correspondaient pas.
Pour ma part après un doctorat en biophysique à l’université de Strasbourg, j’ai effectué deux stages postdoctoraux à l’université de Groningue aux Pays-Bas, sur un total de 3 ans et demi.
Je suis revenu en France où j’ai eu pendant des années pour seule rémunération l’Assedic, en repartant de 6000 F/mois, niveau référencé sur la base d’un salaire de jeune chercheur CNRS, alors que je gagnais le double aux Pays-Bas. Je me suis progressivement retrouvé avec une ASS.
L’Assedic ne peut d’ailleurs jouer aucun rôle pour orienter les jeunes chercheurs, c’est une situation qui les dépasse, de même que l’APEC. Les jeunes docteurs d’université sont en effet une classe à part, car le plus souvent formés et formattés pour la recherche fondamentale.
Parallèlement, j’ai créé une association de recherche fondamentale pluridisciplinaire avec six collègues chercheurs de grande expérience, physiciens, chimistes, biochimistes. Certains au chômage. Après épuisement de nos efforts de recherche de financements, infructueux car à nouveau notre association avait le malheur de comporter le mot "fondamental", j’ai démissionné de ma responsabilité de Président.
Par un concours de circonstances heureux (connaissance d’un Conseiller Général qui a pu m’orienter), j’ai rejoint il y a un peu plus d’un an un laboratoire CNRS, le Laboratoire de Physique Moléculaire à Besançon. Je suis inscrit en qualité d’étudiant en DEA, pour avoir le droit d’y être !
A Strasbourg à la fin de ma thèse, j’étais Assistant Associé des Universités. A Besançon un tel statut n’existe pas.
J’ai pu obtenir une subvention de la Ligue contre le Cancer, équivalente à un SMIC. Ceci ne permet pas à l’université de me constituer un salaire.
Je ne cotise donc pas pour la retraite, et ai la chance de pouvoir encore toucher la Couverture Maladie Universelle.
Comme une multitude de mes collègues, j’ai vécu dans la solitude, l’isolement, la précarité, le sentiment d’abandon et la dépression chronique. Et pourtant avec un bagage conséquent et des idées plein la tête... Aujourd’hui je ne suis plus rien que le travail que je fournis quotidiennement, dans une structure qui m’a accepté et me respecte, et où je retrouve un sens, mais englobée dans un contexte qui m’ignore et m’anéantit.
Mon âge joue en ma défaveur malgré mon expérience, et j’espère encore pouvoir m’intégrer dans une situation stabilisée. Je me sens rejeté par un système qui m’a pourtant poussé au postdoc, et ai pris des risques que mon pays ne reconnaît pas.