Rapport sur la recherche publique française
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, le 24 mars 2004Il est de bon ton aujourd’hui de dire que "la recherche française va mal" et, par une comparaison hâtive avec les Etats-Unis, d’attribuer ce "déclin" à une particularité française : le statut de fonctionnaire des chercheurs.
Il existe des instances d’évaluation, telles que le Comité National d’Evaluation de la Recherche (CNER), qui sont chargées de produire des rapports sérieux et documentés sur la qualité de la recherche française. En particulier, un rapport a été remis au président de la République en avril 2003. Je le joins à ce texte (voir plus bas). Ce rapport présente des données bibliométriques standard, celles de l’ISI (qui, rappelons-le, est une entreprise américaine, qui sélectionne des revues essentiellement anglo-saxonnes dans sa base de données). Celles-ci montrent que, depuis 20 ans, la part de la France dans les publications mondiales a augmenté (en mathématiques, cette part a doublé pour atteindre 8%), comme celle de l’Europe, tandis que la part des Etats-Unis a diminué. L’indice de citation relatif des publications françaises est en revanche significativement plus faible que celui des publications américaines("argument" principal en faveur de la thèse du "déclin"), mais ce depuis 20 ans, et son évolution suit de très près celle de l’indice européen. L’idée que la fonctionnarisation des chercheurs français a provoqué le déclin de la recherche française n’est donc pas du tout étayée par les faits. Le rapport conclut : "La recherche publique est prise dans les débats qui concernent la réforme de l’État, mais ils ne conduisent pas à soutenir qu’il y a en France trop d’État dans le financement de la recherche. La comparaison avec les résultats d’autres pays qui ont une conception différente du statut des chercheurs, sans justifier l’autosatisfaction, ne conduit pas à cette conclusion."
Ceci n’enlève rien aux problèmes d’organisation de la recherche, de moyens, de diffusion du savoir et de brevets, mais en revanche, en ce qui concerne le statut des chercheurs, le discours actuel tient clairement du fantasme du fonctionnaire pantouflard, et certainement pas d’une réalité avérée.
Romain Brette