Contribution du collectif "Sauvons la Recherche Nord-Sud" au Comité d’Initiative et de Proposition
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, le 31 mars 2004Présentation des spécificités et attentes du collectif Sauvons la Recherche Nord-Sud concernant le CIP
Contribution du collectif "Sauvons la Recherche Nord-Sud" au groupe de travail "Recherche et Société" du Comité d’Initiative et de Proposition Réunion du 1er avril 2004
À l’initiative d’agents de l’Institut de Recherche pour le Développement (IRD), un groupe de chercheurs, ingénieurs, techniciens, administratifs, post-doctorants et doctorants s’est constitué en collectif transversal "Sauvons la recherche Nord-Sud". Ce collectif est reconnu par le collectif national Sauvons le Recherche et dispose d’une entrée propre dans le site de SLR : http://recherche-en-danger.apinc.or...
La recherche scientifique avec les pays du Sud (Afrique, Asie, Amérique Centrale et du Sud, Océanie…) est confrontée aux mêmes questions que la recherche française en général mais pose aussi de nombreux problèmes particuliers sur lesquels nous souhaitons réfléchir.
La politique de recherche d’un pays est un choix politique qui correspond à l’adoption de certaines valeurs et traduit la capacité et la volonté de la société de se projeter dans l’avenir. Dans le champ particulier d’intervention qui est le notre, l’efficacité de la recherche ne se mesure pas seulement à la qualité et à la quantité de connaissances produites, elle est aussi fonction de la pertinence de ses résultats pour améliorer à terme des situations critiques, sanitaires ou alimentaires on le sait, mais aussi réduire les différentes formes de dépendance et de causes de pauvreté. De telles recherches, adaptées à ces besoins spécifiques, n’ont pas toujours la même visibilité que celles menées dans et pour les pays les plus avancés (et les plus solvables). Enfin, l’une des fonctions fondamentales de la recherche Nord-Sud est d’aider les équipes de recherche nationales, quelle que soit leur état de développement, à se connecter au courant dominant de la science internationale en organisant systématiquement des partenariats avec des équipes et institutions locales.
Dans le contexte actuel d’augmentation de la compétition pour l’obtention de crédits de recherche et la publication d’articles, nous pouvons légitimement être inquiets au sujet de la pérennité de structures de recherche et de moyens de financement propres à la recherche Nord-Sud.
Ces objectifs bien qu’éminemment utiles pourraient n’être plus considérés que comme secondaires puisqu’ils ne débouchent pas sur des résultats applicables concrètement dans les pays du Nord et que les pays du Sud ne fournissent souvent pas un marché solvable permettant de valoriser les découvertes. Ainsi, on sait déjà que la recherche sur les maladies tropicales (paludisme par exemple) progresse nettement plus lentement que la recherche sur les maladies dont l’impact est prioritaire pour les pays développés (cancer, maladie cardio-vasculaires). De même, l’agronomie tropicale n’a fait que de lents progrès alors que la croissance démographique des pays du Sud nécessite une augmentation de la production agricole, surtout dans le cadre de l’agriculture vivrière familiale.
Nous souhaitons donc engager une réflexion constructive sur les problèmes spécifiques que pose la recherche pour et avec les pays du Sud en organisant un débat ouvert à tous ceux qui se sentent concernés, au Nord comme au Sud. Des réunions-débats seront organisés à Paris et si possible en province et dans les pays du Sud. La communauté concernée étant extrêmement éclatée géographiquement un site web et un forum électronique seront prochainement mis en place. Les thèmes de réflexion proposés par le Comité d’Initiative et de Proposition serviront de base à ces échanges, le but étant d’aboutir à des propositions qui seront retransmises à ce Comité afin que les spécificité de la recherche Nord-Sud soient intégrées aux débats des Etats Généraux de la Recherche.
Concernant la recherche scientifique au Sud, nous chercherons à répondre globalement aux trois questions suivantes : pourquoi ? comment ? dans quelles structures ? Ces questions seront déclinées en fonction des quatre groupes de travail du CIP.
Atelier 1 : Recherche et Société La recherche Nord-Sud est-elle un bien public ou un bien privé ? Quel est l’accès des pays du Sud à ce bien ? Y a-t-il une exception française en termes de recherche au Sud ? Faut-il la préserver en l’état ou en faire la base d’un outil européen ? Quel équilibre entre les différentes fonctions de la recherche au Sud : production de connaissances, application, valorisation, formation bilatérale, vulgarisation, expertise ? Recherche au Sud : quel équilibre entre recherche fondamentale et recherche appliquée ? Doit on considérer la recherche fondamentale comme un luxe pour les pays du Sud sous prétexte que ces pays doivent faire face à de nombreux problèmes immédiats (santé, alimentation…) ? Quels sont les bénéfices d’une recherche Nord-Sud pour le progrès des connaissances scientifiques ? Y a-t-il des domaines de recherches particulièrement concernés ? Comment améliorer la culture scientifique des pays du Sud et de leurs élites ? Comment évaluer la demande sociale des pays du Sud ?
Atelier 2 : Organisation, Structuration et Financement de la recherche publique et privée Quelle doit être la place de la recherche publique et de la recherche privée dans la recherche au Sud ? Comment financer de grands projets de recherche au Sud alors que les moyens techniques à mettre en œuvre sont de plus en plus coûteux ? Quels moyens financiers pour la recherche au Sud ? Comment peuvent-ils être attribués ? Quel sera le rôle des différents ministères (Recherche, Ministère des Affaires Etrangères) ? Quel sera le rôle de l’Europe et des organismes internationaux ? Comment sera structurée la recherche au Sud ? Au sein d’EPST, d’EPIC ? D’un organisme de recherche spécifique ? Quel sera le lien avec les universités françaises et les universités du Sud ? Comment travailler en partenariat ? Quels types d’accord avec les organismes de recherche des pays du Sud ? Rôle du travail en expatriation ou en missions ? Rôle des centres de recherche français à l’étranger ? La transdisciplinarité, entre sciences humaines et sciences de la nature, par exemple doit elle jouer un rôle privilégié dans la recherche au Sud ?
Atelier 3 : Statuts des personnels Comment rendre la recherche au Sud attractive ? Quels débouchés pour les doctorants et post-doctorants ? Quels statuts pour les doctorants, post-doctorants, techniciens, ingénieurs, administratifs et chercheurs ? Comment gérer la carrière et la mobilité des personnels de la recherche Nord-Sud ? Les personnels techniques et administratifs (IT) ont il un rôle particulier à jouer dans la recherche au Sud ? Leur métier présente-t-il des spécificités ? Quel équilibre trouver entre le personnel administratif, le personnel technique et les chercheurs ?
Atelier 4 : Evaluation Les spécificités de la recherche au Sud justifient-elle des procédures particulières d’évaluation pour les structures, le fonctionnement et le personnel de recherche ? Comment évaluer simultanément toutes les missions de la recherche au Sud : production de connaissance, application, valorisation, formation, qualité du partenariat, vulgarisation, expertise ? Quels sont les demandes, en terme d’évaluation de la recherche, des partenaires du Sud et comment les prendre en compte ? Comment étendre la pratique de l’évaluation aux politiques menées par les directions des organismes ?