Lettre au nouveau ministre
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, le 2 avril 2004Bonjour, Nous venons d’avoir un nouveau ministre, je vous propose de lui envoyer, dès aujourd’hui, un mail. L’adresse est la suivante : courrier.ministre@recherche.gouv.fr Vous pouvez lui envoyer le même mail que moi, ou en écrire un vous même... A vos claviers ! Frédéric
Monsieur le Ministre,
Vous venez d’être nommé ministre délégué à la recherche et aux nouvelles technologies, ministère que vous connaissez bien puisque vous avez déjà occupé ce poste entre 1993 et 1997. A cette époque, les dépenses de recherche ont diminué de 2,40% à 2,21% du PIB et la France est passée du 5ème au 8ème rang mondial. Pour cette même période les crédits de paiement inscrits au BCRD (budget civil de recherche et développement) ont diminué de 11 points en volume et plus de 1000 emplois de titulaire (ITA ) ont été supprimés.
L’époque est différente et je ne souhaite pas revenir sur cette époque passée. Vous prenez la charge d’un ministère rempli de chercheurs mécontents. Nous ne sommes pas mécontents du métier que nous faisons que nous considérons comme un métier passionnant, ou les taches sont nombreuses, ou nous travaillons sans cesse à fournir des réponses à nos concitoyens sur des questions fondamentales comme :"y-a-t-il une vie sur Mars ?", mais aussi des questions plus directement connectées au quotidien comme : "les OGM sont-ils des produits dangereux ?". Non, les chercheurs sont mécontents parce que les perspectives de réformes du système de recherche ne sont pas claires. Les objectifs que les gouvernement précédent voulait assigner aux chercheurs n’étaient pas suffisamment lisibles... En effet, que veulent dire des affirmation du type : "il faut développer la culture de performance et de résultat dans la recherche publique" ? La recherche, Monsieur le Ministre, ce fait au niveau international depuis plusieurs dizaines d’années. La communauté des chercheurs français est pleinement consciente des difficultés que cela représente et de l’enjeu d’excellence que cela signifie. En conséquence, Monsieur le Ministre, il est important que vous nous sortiez de cette crise. Pour sortir de cette crise, c’est relativement simple : il suffit d’accorder aux chercheurs ce qu’ils réclament légitimement. Je me permets de vous le rappeler :
restitution des 550 postes de titulaires chercheurs et ITA ;
restitution des crédits récurrents annulés ou supprimés depuis 2002 ;
créations de postes pour l’enseignement supérieur.
Vous ne pouvez pas une nouvelle fois nous dire qu’il faut faire mieux avec moins Monsieur le Ministre. Nous gérons lé pénurie depuis des années. Il est impensable que nous nous serrions la ceinture encore plus.
Enfin, Monsieur le Ministre, Je voudrais attirer votre attention sur les exemples de recherches que j’ai choisi de citer plus haut : l’astrophysique et les OGM. J’ai choisi ces exemples à dessein car ils illustrent bien le double aspect de notre travail de chercheurs : faire rêver nos concitoyens, mais aussi répondre à des questions importantes. C’est essentiel, Monsieur le Ministre, de comprendre qu’il n’y a pas toujours adéquation entre Recherche à retombées sociétales et Recherche à retombées financières. Il faut, j’en suis sûr, que nous soyons attentifs au monde dans lequel nous vivons. Il n’est pas évident que travailler sur le gène de l’obésité plutôt que sur les maladies infectieuses, sur la fabrication de nouvelles armes de destructions massives soit réellement ce que souhaitent nos concitoyens.
Je vous prie de recevoir, Monsieur le Ministre, l’expression de mes sentiments distingués.
Frédéric Restagno Chercheur au CNRS