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Une certaine voix des ITA

Quelques réflexions suivies de propositions sur les métiers d’ITA au CNRS

Par Jacques Covès, le 6 avril 2004

Dans le cadre de la réflexion menée dans les Unités sur la réforme du CNRS et suscitée par le document écrit par Mrs Mégie et Larrouturou, j’ai été amené à réunir les ITA de mon Institut. Un compte-rendu de cette réunion a été envoyé à la direction de l’Institut. Je me propose de vous faire partager l’essentiel de nos conclusions.

Nous pensons important et urgent que l’on entende la voix des ITA dans le mouvement actuel de réflexion. Ces réflexions et ces propositions sont exprimées dans le contexte de la forme actuelle du CNRS et sont valables pour quelqu’autre forme qu’il prendrait. Ces réflexions concernent les Sciences de la Vie et les disciplines connexes.

La première réflexion est de noter l’absence de personnel administratif (le A de ITA) à cette réunion malgré sa forte représentation dans l’Institut. Nous avons interprété cela comme une sensibilité différente vis-à-vis du métier de la recherche pour cette catégorie professionnelle.

Cela amène à réfléchir au fait de classer dans un seul et même cadre des Ingénieurs, des Techniciens et des Administratifs qui n’auront ni le même métier, ni la même mission, ni la même évaluation. Le corps ITA est trop vaste, avec des bornes trop éloignées (par exemple d’Agent Technique à Ingénieur de Recherche en passant par les Administratifs) pour être cohérent. La définition des métiers (telle qu’on la trouve sur le site web du CNRS) est souvent subtile et ambiguë. Elle souffre de recouvrements tels qu’il paraît opportun de simplifier les choses. Par exemple, quelle différence subtile y a-t’il (sur le terrain) entre un AI et un IE ? sur le papier la différence est justifiée par le niveau scolaire ou universitaire de recrutement. Mais ce qui est valable au moment du recrutement l’est-il encore après quelques années dans la fonction ? La réponse peut être non. Cela amène à réfléchir à la définition et à l’évaluation des métiers d’Ingénieur et Technicien et oblige tout de suite à considérer l’évaluation des personnes et des postes. La perception générale est celle d’une évolution de carrière possible uniquement à l’ancienneté (avec le problème du plafonnement des indices et des salaires) sans qu’il y ait évaluation autre qu’administrative des agents et de leurs fonctions. Après un recrutement dans un métier donné, il semble difficile, voire impossible, d’accéder aux grades supérieurs (passer d’AI à IE par exemple, ou IE à IR) sans passer par les concours externes. Une solution pourrait être l’évaluation (soit régulière, soit quand le besoin se fait sentir) d’un agent en fonction de son métier et de la mission qui lui est confiée par une commission dépendant d’une autre Délégation afin de maintenir l’objectivité nécessaire à toute évaluation et de juger de l’adéquation entre le statut et le métier.

Nous proposons de séparer les A des IT afin de former 2 corps distincts avec missions évidemment différentes. Nous proposons de ne plus considérer que 2 sous-corps : les Techniciens et les Ingénieurs. Dans chaque sous-corps, les grades pourraient correspondre aux qualifications de recrutement actuellement retenues mais ils seraient franchis à l’ancienneté et/ou après évaluation en fonctions des besoins de l’agent et/ou du service. Ces promotions ne devraient s’accompagner de mobilité qu’à la condition qu’elle soit désirée par l’agent.

Les métiers de Technicien et d’Ingénieur (au CNRS au moins) sont à vocation technologique (voir fiche d’emploi-type sur le site web). Or, et le problème est crucial pour les IR qui sont recrutés avec un Doctorat (mais le problème existe aussi potentiellement pour les IE), de nombreux recrutés sont affectés à des missions de recherche pure et font donc un travail de chercheur dans les mêmes conditions que ceux-ci : recherches de crédits, encadrements de stagiaires (DEA, thèses…), publications, enseignement, conférences…. Nous proposons qu’il existe des passerelles vers le corps des chercheurs pour ceux qui mènent des recherches et qu’il faut distinguer de ceux qui participent aux recherches (la nuance n’est pas péjorative) : halte à l’hypocrisie du chercheur déguisé. Cela suppose encore une fois qu’il y ait évaluation réelle du métier et des conditions de travail. Ces mêmes passerelles doivent pouvoir se faire dans le sens chercheurs-ITA également. Cela dépend, là aussi, de l’évaluation de l’agent et du métier qu’il fait réellement. Ces passerelles doivent pouvoir se franchir sans changer d’équipe ou dans le cadre d’une mobilité si elle est désirée par l’agent.

Nous proposons donc qu’il n’y ait de recrutement possible d’Ingénieurs (IR ou IE) qu’à la condition sine qua non que leur mission soit technologique. Le recrutement d’un IR par un laboratoire ne doit plus conduire à recruter un chercheur déguisé. Nous proposons qu’un IE puisse passer IR dès que son ancienneté et sa qualification équivalent à une formation diplômante. Le problème général est celui de l’adéquation entre le statut et le métier comme cela a déjà été signalé plus haut. Bien évidemment cela suppose aussi de cesser les recrutements en sur-qualification qui ne peuvent à terme que mener à des frustrations d’évolution de carrière. Nous proposons aussi l’intégration pure et simple des IR et IE qui ont un rôle avéré de chercheurs déguisés dans le corps des chercheurs (à un grade précisément évalué : CR ou DR) après examen de leur dossier scientifique. On peut, si nécessaire, imaginer un contingent de postes dédiés chaque année, dans les 2 sens, à ces passerelles.

Les problèmes liés à la mobilité sont aussi mal ressentis. Le système est contraint par les NOEMI. Dans le cadre d’un plan de carrière pensé, un agent doit pouvoir demander une mutation spontanément pour rejoindre une autre équipe ou un autre laboratoire. Là encore une évaluation pertinente de la demande devrait rendre la chose possible.

La question des salaires a aussi été évoquée. Les ITA perçoivent 2 primes par an qui sont imposables mais n’entrent pas dans le calcul de la retraite. Ce système est injuste et archaïque. Pourquoi par exemple un IR et un CR (ou DR) qui font le même travail, ou un travail équivalent, dans un même laboratoire après la même formation diplômante (un doctorat), doivent ils avoir des salaires différents et un niveau de vie à la retraite différent ?

Enfin, la question a été évoquée de la politique de communication de l’administration du CNRS. Alors que la communication administrative est très bonne (site web, contacts avec les Délégations Régionales), la communication humaine laisse à désirer. Le problème est crucial en cas de concours. Il n’y a le plus souvent aucun retour d’évaluation, les personnes à contacter sont difficilement identifiables, en cas d’échec, il est difficile voire impossible de savoir ce qui a péché, comment s’améliorer, s’il est opportun de recommencer à postuler et dans quels délais. Cette carence est source de frustration. Pallier cette frustration devrait être du ressort d’un service des ressources humaines visible et compétent.

Le statut des ITA ne semble pas entrer directement dans la problématique de réforme du CNRS (ou plus généralement de la recherche publique). Il suffit pour s’en convaincre de lire le document de Mrs Larrouturou et Mégie. Il est essentiellement question des ITA au chapitre de la mobilité et notamment de la mobilité externe temporaire sans qu’il soit réellement précisé ce que cela veut dire. Les ITA, leurs missions, leurs métiers, ce qu’ils représentent, leur évaluation, ne sont manifestement que les parents pauvres du système. Ce n’et pas le cas des missions et du métier des chercheurs et, encore une fois, cette dichotomie, parfois à qualification équivalente, est source de frustration et d’incompréhension de la part des ITA.