L’Association "Sauvons la Recherche" Groupes de travail Comités loc. et transv. Université de printemps 2011 EUROPE
Accès thématique Emploi et précarité Communiqués de SLR Actualités communiqués partenaires
Médiathèque Les archives Documentation revue de presse Tribunes et Contributions
accueil contact plan du site admin
caractères +caractères -
article
réactions (0)
Accueil / Tribunes et Contributions / La recherche : un sytème trop souvent pervers

La recherche : un sytème trop souvent pervers

Par Jean-Olivier Durand, le 23 juin 2004

D’après les directeurs des ressources humaines, une personne sur deux dans la recherche est mal dans sa tête et mal dans sa peau. Une bonne raison : le pouvoir est trop souvent entre les mains de psychopathes, en souffrance identitaire ou particulièrement atteints par la haine, ce qui crée alors une perversion hors norme. Ci-dessous un texte de C.G. Jung

« C’est en tout cas un fait évident que la moralité d’une société, prise dans son ensemble, est inversement proportionnelle à ses dimensions ; car plus il y a d’individus qui s’agglomèrent, plus les facteurs individuels se neutralisent, s’éteignent les uns les autres, y compris la moralité, qui repose en entier sur le sentiment moral de chacun et partant sur la liberté indispensable à l’individu pour l’extérioriser. C’est ce qui explique que l’être, lorsqu’il est inclus dans la société est en un certain sens, inconsciemment, un homme plus mauvais que lorsqu’il agit uniquement de lui-même ; car il se sent porté par la société et déchargé, dans cette mesure, de sa responsabilité individuelle . Une société nombreuse, toute composée d’êtres d’une valeur exceptionnelle, ressemble, par sa moralité et son intelligence, à un animal géant, stupide, et brutal. Plus les organisations sont considérables, plus inéluctables sont aussi leur immoralité et leur bêtise aveugle. (Senatus bestia, senatores boni viri). Puisque la société souligne en chacun de ses ressortissants les qualités collectives, elle accorde ainsi par le fait même, une prime à tout ce qui est moyen et médiocre, à tout ce qui ne demande qu’à végéter dans le laisser aller et l’irresponsabilité ; il est inévitable que l’individu soit opprimé, acculé »…… « Il ne peut y avoir de moralité sans liberté. Notre admiration des grands organismes fond quand nous entrevoyons le revers de la médaille que cachent ses merveilles : il est fait de l’amoncellement monstrueux de tout ce qu’il y a de primitif en l’homme, de la destruction inéluctable de son individualité au profit du monstre que constitue, une fois pour toute, chaque organisme tentaculaire. Un homme d’aujourd’hui, qui correspond plus ou moins à l’idéal moral collectif, a transformé son cœur, même s’il n’en ressent subjectivement aucune perturbation, en une oubliette du crime, ce que l’on peut prouver sans difficulté par l’analyse de son inconscient. Dans la mesure où il est normalement adapté à son entourage, l’infamie la plus monstrueuse ne le troublera pas, à la condition toutefois que la majorité de ses concitoyens continuent de croire à la haute moralité de leur organisation sociale ». ….. « De soi-disant chefs sont les symptômes inévitables de tout mouvement de masse. Les vrais chefs de l’humanité, cependant, sont toujours ceux qui, méditant sur eux-mêmes, soulagent le poids de la masse de leur propre poids, en demeurant consciemment éloignés de l’inertie naturelle et aveugle, inhérente à toute masse en mouvement. Mais qui donc est capable de résister à cette puissance attractive écrasante, dans le flot de laquelle chacun se cramponne à son voisin, tous s’entraînant les uns les autres ? Seul peut résister celui qui ne se cantonne pas dans l’extérieur, mais celui qui prend appui dans son monde intérieur et y possède un havre sûr »…… . « Si la grande chose qu’est la culture va de travers, cela tient simplement à ce que les hommes pris isolément vont de travers, à ce que je vais de travers. Raisonnablement, il faudra commencer par me redresser moi-même. Mais, comme l’autorité n’a plus d’instance suprême et que, ainsi énucléée, elle n’a plus barre sur l’individu, j’ai besoin d’une connaissance et d’une reconnaissance des bases les plus spécifiques et les plus intimes de mon être subjectif, afin de bâtir les données éternelles de l’âme humaine ».

…..Je sais bien que le mot « psychopatique » résonne bien durement à l’oreille du profane et que celui-ci lui associe des représentations qui évoque l’épouvante attachée, par exemple, au asiles d’aliénés……C’est qu’il ignore que seul un pourcentage minime des malades dits psychopathes fait connaissance avec la clinique psychiatrique. La majorité écrasante des psychopathes forme une composante pour ainsi dire « normale » de la population. La notion de « normal » n’est qu’une construction abstraite. Il existe ce que l’on appelle une « latitude du normal », expression qui avoue implicitement que la notion de normal varie entre certaine frontières et ne saurait, par suite, être définie de manière rigoureuse. Mais que survienne une oscillation un peu plus forte que d’habitude … et le processus psychique en cours se meut déjà dans les territoires de l’anormal. Pareille déviation -qui sont très fréquentes- ne sautent pas aux yeux temps qu’elle ne mènent pas à des manifestations proprement maladives. Mais que surviennent des symptômes clair et indésirables, dont le profane s’aperçoit aussi, et il s’agit d’un « paschein » psychique c’est à dire en grec, d’une souffrance psychique, précisément de psychopathie. Les degrés les plus légers de celle-ci sont les plus fréquents et ses degrés les plus graves les plus rares. Il y a une foule innombrable d’êtres qui, dans telle ou telle direction, de façon momentanée ou chronique outrepassent de-ci de-là la latitude du normal. Que ces êtres s’amassent -ce qui est d’ailleurs le cas dans chaque foule- et des manifestations maladives prennent naissances.

Carl Gustav Jung : « Aspects du drame contemporain ».